Alba Ventura : "Le PS paie l'héritage de Martine Aubry"

Ça gronde au Parti socialiste. À 24 heures de son grand discours de politique générale, Manuel Valls est confronté à la fronde d'un tiers des députés socialistes. Ils sont 88 à lancer un avertissement au gouvernement.

Le camp de Hollande en ébullition

Un nouveau Premier ministre menacé par ses propres troupes, c'est rarissime. Des députés qui couinent, des députés qui ne sont pas d'accord avec la ligne, on en a déjà entendus. Mais là, c'est du jamais vu.

Que les Verts claquent la porte, ça peut arriver (c'est arrivé !). Ils font partie de la majorité, ce sont des alliés, mais ils ne sont pas socialistes.

Là, c'est le parti du Président, le propre camp de François Hollande, qui vient lui dire : "Ta politique, on n'en veut pas ! Ton Premier ministre, il est trop à droite ! " C'est "Écoute-nous, ou on fait un malheur !"

Les députés ne sont pas suicidaires

Peut-on imaginer qu'ils ne votent pas la confiance ? Jamais de la vie ! C'est là où ça fait "flop". Il y aura peut être une petite poignée d'abstentionnistes. Mais ils ne sont pas suicidaires. Ne pas voter la confiance, ça veut dire pas de gouvernement, ça veut dire crise politique. Cela veut dire prendre le risque d'une dissolution.

Vous imaginez franchement le PS mettre le gouvernement en minorité, se saborder ? Les députés socialistes ne sont pas fous. Ils n'ont pas envie de perdre leurs postes. Un siège, c'est quand même plus précieux que la liberté de parole. On a le droit claquer les portes, mais faut faire attention de ne pas laisser les clés à l'intérieur.

Le problème, c'est le PS

Comment Manuel Valls va-t-il gérer cette fronde ? En traitant les députés socialistes - c'est ce qu'il a fait ce week-end - en les recevant à Matignon. Il y aura aussi quelques gestes. Mais fondamentalement, le problème n'est pas là. Le problème, c'est le Parti socialiste.

Tout cela en dit long sur ce qu'est le PS, qui regroupe des sociaux-libéraux et d'autres qui voudraient faire la révolution avec Mélenchon. Autrement dit, un PS de centre-gauche et un PS à la gauche de la gauche. On dit souvent : "Au PS, deux socialistes, trois avis !"

Ce que l'on constate, c'est que le Parti socialiste est un parti qui ne s'est pas réformé. Partout en Europe, les socialistes ont bougé avec leur leader. En Allemagne, avec Schroeder ; en Angleterre, avec Blair. Chez nous, le PS c'est la dérive des continents, la tectonique des plaques.

Les "aubryistes" à la manœuvre

C'est d'abord la faute à François Hollande, qui n'a cherché qu'à faire la synthèse pendant dix ans. On voit les résultats. Mais là, il y a surtout la marque de Martine Aubry. Ce sont les "aubryistes" qui sont à la manœuvre. La fracture du PS, c'est la fracture entre Aubry et Hollande.

Ce qui se paie aujourd'hui, c'est l'héritage Aubry. C'est elle qui a flatté la gauche de la gauche en lui faisant croire qu'elle allait prendre le pouvoir. C'est elle qui leur a donné des circonscriptions quand elle était la patronne. C'est elle qui a pactisé avec les Verts.

Elle pensait que François Hollande allait barrer à gauche. Manque de chance, il barre à droite... Sans compter qu'à part une ministre - Marylise Lebranchu -, il n'y a pas grand monde qui représente la maire de Lille dans le nouveau gouvernement.

Tout cela crée des rancœurs. Aujourd'hui, entre sa majorité et sa politique, Hollande a choisi sa politique. Il faut qu'il s'attende désormais à trois ans de bagarre parlementaire. Rien sera épargné à Manuel Valls.

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