Alba Ventura : "François Bayrou à la recherche du bon tempo"
CHRONIQUE - "À droite toute !" pour François Bayrou. Le président du MoDem sera soutenu par l'UMP dans sa troisième tentative de conquérir la mairie de Pau. Pas mal pour un homme qui a voté Hollande en 2012 !
Jusque-là hostile à soutenir François Bayrou, l'accusant d'avoir contribué à la défaite de Nicolas Sarkozy en 2012, le président de l'UMP, Jean-François Copé, a finalement donné sonfeu vert à un accord entre le candidat UMP, Eric Saubatte, et le président du parti centriste.
On se dit que François Bayrou aura bouclé la boucle. C'est vrai que c'est une sacrée chicane qu'il a opérée en deux ans. Il faut imaginer ce que c'est que d'être investi par l'UMP aujourd'hui pour quelqu'un qui a rompu avec la droite, qui s'est détourné de ses anciens alliés, et qui a écrit en 2009 un livre assassin sur Nicolas Sarkozy (Abus de pouvoir). Un ouvrage dans lequel il traitait l'ancien chef de l'État d'"enfant barbare" !
Hollande a franchi le Rubicon du centre
François Bayrou se retrouve donc à toper avec ceux avec lesquels il s'insultait il y a deux ans. On l'avait vu rentrer au bercail depuis son union libre avec Jean-Louis Borloo. Mais là, avec le label UMP, il redevient un homme de droite, comme quand il était ministre de Balladur en 1993. Il voulait incarner la révolution centristes. Il a surtout effectué un tour complet sur lui-même.
Ça n'a toutefois pas l'air d'être sans regret pour le leader du MoDem. On entend bien le regret vis-à-vis de François Hollande, quand il dit à propos du nouveau discours du président : c'est "la première secousse d'un tremblement de terre". C'est cette révolution qu'il a tant attendue.
Si on se met deux secondes à la place de François Bayrou, il doit se dire : "Il m'a bien eu là, François Hollande". Rendez-vous compte : Bayrou se retrouve à droite au moment où Hollande franchit le Rubicon pour le centre.
Que reste-t-il comme divergences entre François Hollande et François Bayrou ? Sur le papier, ce sont franchement des gens qui sont faits pour travailler ensemble. Le centriste paraît plus proche du social-démocrate que de l'UMP (une bonne partie du MoDem est à gauche).
Retour à la case départ
On entend aussi l'amertume quand Bayrou dit que les propos de Hollande arrivent sans doute "trop tard". C'est un Bayrou encore fâché qui vient de comprendre que Hollande est en train de montrer qu'il y a un chemin au milieu. Cette fameuse "troisième voie" entre la gauche et la droite, ça a toujours été son l'objectif et le destin du patron du MoDem.
C'est très probablement un chemin sans retour pour le leader centriste. Mais une question reste : "C'est un chemin vers quoi ?" Car après quinze ans de traversée du désert, Bayrou est bien revenu à la case départ. Que lui reste-t-il ? La présidentielle de 2017 ? Même ses amis ont des doutes.
Bayrou semble s'être fait une raison
Quel sera son avenir avec Borloo après les élections européennes ? On dit que les sarkozystes cherchent à se rapprocher du patron de l'UDI. Et si Borloo pactisait avec Sarkozy pour 2017 ? Bayrou aurait du mal à le suivre. Qu'a-t-il de commun avec Jean-François Copé, qui lui voue une haine tenace ?
Bayrou pourrait finalement se contenter de Pau, sur le modèle d'Alain Juppé à Bordeaux : un de ces hommes en réserve de la République, qui pourrait servir, mais on ne sait pas bien quand ni comment. Il a cru en son destin, il a cru qu'il pouvait faire changer les choses, il avait la foi. Visiblement, il s'est fait une raison. Il se rêvait roi, il se retrouve baron... pour peu que les électeurs valident ce choix.
