La rue Turner à Birmingham en Angleterre a été rebaptisée "rue des allocations sociales" le temps d'un reality show britannique qui dresse un portrait accablant des bénéficiaires de l'État-providence, suscitant des réactions enflammées en plein débat sur la réforme du système.
L'émission produite par la chaîne privée Channel 4 suit la vie des
vrais habitants de cette rue de Birmingham, deuxième ville du
Royaume-Uni où le taux de chômage culmine à 16,5%, soit deux fois plus
que le taux national. Dans le premier épisode de "Benefits Street" (rue des allocations
sociales), qui a fait un carton le 8 janvier avec sept millions de
téléspectateurs, un voleur explique comment voler des vêtements dans
des magasins. Un couple confesse, en riant, avoir été pris en flagrant
délit de frauder le système des allocations sociales. Des gens vont et
viennent avec des canettes de bière dans la rue. Les habitants de
Turner Street qui travaillent n'apparaissent pas eux dans l'émission.
Le programme a suscité des commentaires d'une violence inouïe sur la
Toile. "Voir cette racaille dans Benefits Street me rend dingue. Allez
bosser, bande de chiens", lance @sasharabella sur Twitter. "Quelle
pourriture de voyous. Une balle coûte environ 30 pence, donc avec un
billet de 20 livres (24 euros, NDLR), on pourrait se débarrasser de la
rue et avoir encore de la monnaie en poche", se déchaîne @garryturner4
sur le même réseau social.
A l'inverse, plus de 20.000 personnes écœurées par l'émission ont
signé une pétition exigeant son interruption. Des protagonistes du
reality show se disent pour leur part trahis par Channel 4. "Ils nous
ont dit qu'ils voulaient saisir l'état d'esprit de la rue Turner et
montrer le positif, mais la seule chose qu'ils ont faite est montré le
négatif", s'insurge sur la BBC Dean Oakes, qui apparaît dans le premier
épisode.
La chaîne se défend en estimant qu'"aucune émission sur le sujet ne
satisfera tout le monde". "Le tollé qu'elle a suscité me conforte dans
l'idée de la nécessité absolue de proposer des programmes sur le sujet. Éviter la réalité quotidienne ou l'édulcorer serait un manquement à
notre devoir", a jugé le patron des documentaires à Channel 4, Nick
Mirsky, dans une tribune au journal The Guardian.
Le moment choisi pour diffuser cette émission n'est pas anodin: le
Premier ministre conservateur David Cameron a engagé une vaste réforme
de l'État providence, et des tabloïds jettent régulièrement en pâture
les noms de fraudeurs présumés. En début d'année, le ministre des Finances, George Osborne, a
annoncé une nouvelle baisse colossale des aides sociales: 12 milliards
de livres (14,5 milliards d'euros) entre 2015 et 2017. "Où est la
justice pour le travailleur qui s'en va au travail tôt le matin alors
qu'il fait encore nuit et voit les rideaux fermés de son voisin qui se
la coule douce grâce aux allocations?", avait-il lancé en octobre.
L'État britannique a dépensé 7.641 euros par habitant sous forme de
prestations sociales en 2011, selon les dernières statistiques
comparatives d'Eurostat. Soit à peine plus que la moyenne européenne,
qui se situe à 7.290 euros, et loin du Luxembourg, le pays le plus
généreux avec 18.136 euros, ou encore du Danemark (14.785 euros) ou de
la France (10.300 euros).
La présidente de la commission parlementaire chargée du travail,
Anne Begg, membre de l'opposition travailliste, a accusé Channel 4 de
se focaliser sur "des cas extrêmes", à partir desquels "les gens
extrapolent". "Il n'y avait pas un seul bénéficiaire classique dans
l'émission", a-t-elle dénoncé. John Bird, fondateur du journal Big Issue vendu par les sans-abri,
estime lui que l'émission reflète la réalité. "Dépendre des aides
sociales est abrutissant", explique-t-il dans le Daily Mail, accusant
le système d'"encourager de façon perverse à la paresse."
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