La réglementation dans l'utilisation de méthodes alternatives sur les animaux d'élevage a été durcie, alors même que les consommateurs comme le gouvernement plaident pour une baisse de l'usage des antibiotiques. "Il y a deux nouvelles réglementations européenne et française qui visent à déposséder les éleveurs de la prescription des plantes pour les mettre aux mains des grands groupes pharmaceutiques", dénonce Jean-Louis Meurot, co-responsable de la Commission sanitaire de la Confédération paysanne, syndicat agricole minoritaire.
Cet éleveur de brebis dans la Drôme ne décolère pas car depuis la nuit des temps, les agriculteurs ramassent des plantes dans la nature (thym, sarriette, etc.) pour leurs bêtes. Lui donne par exemple des tisanes concentrées à ses animaux au printemps, juste avant la mise à l'herbe, pour les aider à se battre contre les parasites digestifs. D'autres utilisent aussi des huiles essentielles, sur les vaches après la traite pour prévenir les mammites (inflammation des mamelles), ou sur le cordon ombilical des veaux pour les aider à cicatriser.
"Les solutions alternatives permettent de gérer 75% des maladies des troupeaux", assure même Philippe Labre, vétérinaire-formateur, considéré comme le grand spécialiste des médecines naturelles en élevage en France.
Des pratiques qui ne
sont plus réservées aux productions "bio" face aux demandes des
consommateurs conscients des problèmes d'antibiorésistance. Carrefour a
même créé une filière de poulets garantie "sans antibios" qui cartonne. Le
gouvernement table lui sur une réduction de 25% de l'usage des
antibiotiques vétérinaires en cinq ans (2012-2017), à travers son plan
"Ecoantibio". Mais paradoxalement, la réglementation concernant l'usage
de méthodes à base de plantes s'est durcie ces derniers mois.
L'Union européenne a d'abord publié en mars 2013 un règlement (UE 230-2013) imposant le retrait du marché de centaines d'extraits aromatiques végétaux employés en aliments complémentaires. Un choix motivé, selon Philippe Labre, "par l'absence d'achat du droit d'homologation, procédure contestable pour des produits naturels, biens communs vivants qui doivent rester inaliénables tant qu'ils ne sont pas préoccupants". La sarriette, le trèfle, la luzerne, l'orge, le noisetier, ont ainsi été retirés du marché, alors qu'il s'agit de plantes "d'utilisation traditionnelle et populaire" et qui sont en plus "naturellement présentes dans les prairies", s'indigne le vétérinaire.
En France, l'Anses, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, a publié en août 2013 une circulaire dont il découle que tout produit à base de plantes doit disposer d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) et d'une prescription par ordonnance pour être utilisé dans un élevage.
C'est comme cela qu'une
éleveuse bio dans la Drôme, Sandrine Lizaga, est devenue une "hors la
loi". A la suite d'un contrôle, elle a reçu de la préfecture un "rappel
réglementaire" lui demandant d'apporter des "mesures correctives" aux
non-conformités constatées. "Pour toucher les aides européennes de
la Politique agricole commune, il faut satisfaire à certaines
conditions et notamment aux règles sur le 'paquet hygiène'", enchaîne
Jean-Louis Meurot, qui craint que certains éleveurs ne perdent des aides
sans lesquelles ils ne pourraient plus vivre.
Interrogée par l'AFP, la DGAL, direction générale de l'alimentation, rappelle qu'il n'y a pas que les plantes qui permettent de réduire l'usage d'antibiotiques. Il y a aussi les bonnes pratiques d'élevage, l'état des bâtiments (plus ils sont vétustes, plus les maladies circulent). Et il faut surtout arrêter le recours automatique et "revenir à des molécules anciennes, qui génèrent très peu de résistance", énumère Charles Martins Ferreira, adjoint au sous-directeur santé.
Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, pourtant chantre de l'agroécologie, joue lui la prudence dans ce dossier. "Ce n'est pas parce qu'une matière active est naturelle qu'elle ne peut pas avoir de conséquences sur la santé. Donc, il faut qu'on soit extrêmement précautionneux et qu'il n'y ait pas de réglementation différenciée entre les produits chimiques et les matières actives" d'origine naturelle, explique-t-il à l'AFP.
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