Baseball : quand les Dodgers abandonnaient Brooklyn pour déménager à Los Angeles

C'était il y a soixante ans presque jour pour jour, et pourtant on continue à en parler. Cela fait partie de la légende de New York. Imaginez que l'Olympique de Marseille décide de quitter la douceur provinciale pour aller s'installer à Paris : c'est exactement ce qui s’est passé en 1957, lorsque l'équipe mythique des Dodgers de Brooklyn s'est délocalisée à l'autre bout du pays, en devenant les Los Angeles Dodgers (les Dodgers de Los Angeles). Pour des raisons financières, les propriétaires voulaient construire un grand stade, avoir des spectateurs plus riches, et gagner plus d'argent. Brooklyn ne s’en est jamais totalement remis.

Les Dodgers, ce n'était pas seulement un club de baseball. C'était ce qui a donné une identité aux différentes communautés qui se retrouvaient dans cette ville industrielle, ouvrière, populaire, avalée par New York. Mais elle était regardée de haut par le reste de la ville, et notamment Manhattan qui supportait les Yankees, l'autre grande équipe de base ball. Les Juifs d'Europe de l'Est, les Noirs descendants d'esclaves, les Italiens, les Irlandais et les Porto-Ricains, qui se retrouvaient à vivre ensemble à Brooklyn, avec des traditions culturelles très différentes, oubliaient les tensions quand ils se retrouvaient aux matchs des Dodgers.

L'équipe rassemblait Brooklyn. Elle a aussi été la première dans l'ère moderne à avoir sélectionné un joueur noir incroyable, Jackie Robinson, qui a permis aux Dodgers, souvent moqués pour leurs résultats médiocres, de devenir une grande équipe, et même, en 1955, de battre enfin les rivaux des New York Yankees et de gagner le championnat. C'est après ce succès de légende que les propriétaires ont décidé de quitter le Brooklyn populaire et sombre pour déménager l'équipe sur les hauteurs de Los Angeles, où le stade, entouré de palmiers, avec des parkings à perte de vue, n'a pas grand chose à voir avec l'environnement industriel de Brooklyn.

Quand vous arrivez au Dodgers Stadium à Los Angeles, il y a même une statue de Jackie Robinson, qui n'a jamais joué là. Mais cela rappelle que les propriétaires sont venus faire fructifier la légende au soleil, en abandonnant le Brooklyn populaire. Certains, aujourd'hui âgés, racontent encore ce départ comme un chagrin d'amour.