Dick Rivers, crooner authentique et ambassadeur du blues et du rock en France

Le 24 avril restera comme la date clef de la vie de Dick Rivers. Le célèbre rockeur français aux cheveux noir de jais est né un 24 avril 1945 à Nice et il est mort le même jour, 74 années plus tard, le 24 avril 2019 des suites d'un cancer. 

C'est son manager, Denis Sabouret, qui a annoncé la nouvelle sur les réseaux sociaux. C'est aussi un 24 avril que le jeune homme a commencé sa carrière musicale en signant son premier album avec les Chats Sauvages en 1961.

Dick Rivers, de son véritable nom Hervé Forneri, était l'une des trois incarnations du rock à la française avec le puissant Johnny Hallyday et le plus mélancolique Eddy Mitchell. Tous les trois, très différents mais fondamentalement inspirés par les grandes voix et les musiciens de talents américains, représentaient une facette du blues et du rock. Dick Rivers penchait résolument du côté des crooners. 

En 55 ans de carrière, Dick Rivers a enregistré 33 albums en studios et 3 albums live. Il n'a jamais pris sa retraite. En 2018, il réalisait une tournée avec les vedettes d'Âge Tendre mais aussi en solo sur les routes de France. Son dernier enregistrement studio était en compagnie de Julien Doré la même année pour une reprise de la chanson Africa. 

Les débuts avec les Chats Sauvages

Né le 24 avril 1945 à Nice, fils unique d'un boucher, Hervé Forneri fonde Les Chats Sauvages à 15 ans et devient Dick Rivers en s'inspirant de Deke Rivers, personnage joué par Elvis Presley dans le film de Hal Kanter Loving You (1957). Il adopte banane gominée et bottes de cow-boy. 

Le rêve américain fait tourner la tête du jeune Hervé, enfant sage au visage pointu. Il écoute Elvis chanter et c'est le choc : "J'ai trouvé Dieu !". Il décide de chanter. Avec Les Chats Sauvages, il publie en avril 1961 son premier 45 tours, Ma p'tite amie est vache, monte à Paris : "Je suis passé brutalement de la Mobylette à la Cadillac", dira-t-il. Deux ans plus tard, après Twist à Saint-Tropez et d'autres succès adaptés de tubes anglo-saxons, il se lance en solo.

Il se cantonne au rôle d'interprète, reste fidèle à ses choix, malgré les traversées du désert : "Je n'ai jamais enregistré de soupe pour être à la mode". Il rencontre Elvis à Las Vegas en 1969 - une photo l'atteste dans son salon - mais le mouvement hippy de la fin des années 1960 lui est presque fatal. 

"Nice Baie des Anges"

Le public boude L'interrogation (1969), concocté par Gérard Manset avec 72 musiciens. Vingt ans plus tard, Linda Lu Baker, autre album-concept avec le Golden Gate Quartet et Frédéric Mitterrand, ne se vendra guère plus. Au début des années 1970, il travaille avec Alain Bashung, directeur artistique de trois de ses albums, dont il retrouvera en 2011 le parolier Jean Fauque pour Mister D. Suivent des succès comme Maman n'aime pas ma musique (1974) ou Faire un pont (1976), adapté du Country Roads de John Denver, dans l'album Mississipi River's à la pochette dessinée par Morris.

En 1984, c'est Nice Baie des Anges et deux ans après, un livre de souvenirs, Hamburger, pan-bagnat, rock'n'roll, réédité en 1996 sous le titre Very Dick. Il écrira aussi deux romans, Complot à Memphis (1989) et Texas Blue (2001). Les années 1990 marquent un tournant. Il retrouve la scène en 1995 après 19 ans d'absence, la popularité de sa caricature télévisée Didier l'Embrouille réalisée par Antoine de Caunes sur Canal + lui profite. 

"Troisième roue de la charrette"

Au cinéma, il débute en 1999 dans La candide Madame Duff de Jean-Pierre Mocky qu'il retrouvera pour Le Furet (2003). Il est invité au Festival de Cannes 2005 par George Lucas, alors compagnon de sa fille adoptive.

Il joue aussi au Théâtre National de Chaillot dans Les Paravents de Jean Genet (2004). Ses disques deviennent de plus en plus personnels, il fait appel à de jeunes talents : Benjamin Biolay ou Mickey 3D, puis Joseph d'Anvers pour L'homme sans âge (2008) ou Oli le Baron pour Mister D, sorti pour ses cinquante ans de carrière.

Dans un livre d'entretiens avec Sam Bernett publié parallèlement, il dit sa frustration d'être la "troisième roue de la charrette" du rock français et se plaint du "manque de reconnaissance" d'animateurs de télévision comme Michel Drucker qui ne l'a jamais invité.

Dick Rivers laisse derrière lui son fils unique, Pascal, né de son union avec sa première épouse Micheline, un petit-fils et sa seconde épouse Babette. Il n'avait jamais arrêté sa carrière même après une mauvaise chute et un traumatisme crânien en 2015. Il accompagnait les stars d'antan dans la nostalgique et très populaire tournée Âge Tendre, la tournée des idoles en 2018.