Il laisse derrière lui un monument du cinéma de documentaire. Claude Lanzmann est mort à Paris ce jeudi 5 juillet, à l'âge de 92 ans. Également journaliste, directeur des Temps Modernes et écrivain, "Claude Lanzmann est mort ce matin à son domicile. Il était très très faible depuis quelques jours", a indiqué une porte-parole de son éditeur, Gallimard.
Avec Shoah, son oeuvre majeure, Claude Lanzmann est parti sur les traces du génocide juif pendant la Seconde Guerre Mondiale. Un film qui a bouleversé une époque. En 9 heures et demie, le film retrace minutieusement l'extermination des juifs par le régime nazi entre 1933 et 1945. Une première partie s'intéresse aux convois, à l'acheminement et à l'arrivée des juifs dans les camps de concentration. Le deuxième volet de l'enquête se penche sur le processus d'extermination.
Shoah marque un tournant dans la représentation du génocide. Le réalisateur a fait le choix de n'avoir recours à aucune scène de reconstitution, de fiction ou à des images d'archives. Il donne simplement, face caméra, la parole à ceux qui sont revenus des camps, leurs contemporains et des nazis. Le projet de Claude Lanzmann était de mettre des mots sur l'indicible et de représenter l'holocauste. "[Les personnages du film] sont des porte-paroles des morts", expliquait-il au micro de France Culture en 2006. "Représenter, Shoah ne fait que cela dans tous les sens du mot, rendre présent aussi", poursuivait-il.
Les personnages du film sont des porte-paroles des morts
Claude Lanzmann, France Culture, 2006
Ce film a demandé un travail colossal en termes de recherches et d'enquêtes. Dix années ont été nécessaires à sa fabrication, 350 heures de tournage, 14 pays parcourus pour recueillir des témoignages. L'idée du titre "Shoah" ("catastrophe" en hébreu) ne lui est venu qu'a la fin de la réalisation de son projet. "Je me suis battu pour imposer “Shoah” sans savoir que je procédais ainsi à un acte radical de nomination, puisque presque aussitôt le titre du film est devenu, en de nombreuses langues, le nom même de l’événement dans son absolue singularité. Le film a été d’emblée éponyme, on s’est mis partout à dire “la Shoah", racontait Claude Lanzmann en 2005 au journal Le Monde. Avant la sortie du film en 1985, le génocide juif n'était pas encore désigné par ce terme.
Shoah a marqué par sa portée. Au-delà d'un outil pédagogique, Claude Lanzmann incarne avec son film le devoir de mémoire de cet événement monstrueux, qui était alors en partie occulté depuis la fin de la guerre. Pour le réalisateur lui-même, son film est une "élaboration minutieuse et la construction inattaquable d'une mémoire", a-t-il dit sur France Culture en 2006.
À sa sortie, le film fait sensation. En France, Shoah est diffusé pour la première fois en 1987 sur TF1. "La chaîne, qui venait d'être privatisée, l'a diffusé avec beaucoup d'à-propos au moment du procès Barbie, vers 22 h 30, quatre soirs de suite. Sans une coupure publicitaire", se souvenait-il dans les pages du Figaro. Au total, plus de 5 millions de Français se sont rassemblés devant leur écran. "J'ai reçu des centaines de lettres. Les gens s'arrangeaient pour veiller, certains dînaient plus tôt, dormaient un peu et se relevaient pour voir le film".
Shoah est récompensé par un César d'honneur en 1986.
La veille de sa mort, mercredi 4 juillet, "Les Quatre sœurs" sortait en salle. Claude Lanzmann y a recueilli la parole de quatre femmes ayant connu l'horreur des camps.
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