François Hollande décidé à renouer le lien avec les Français

Opération reconquête. Plombé par les sondages négatifs, à la tête d'une majorité en ordre dispersé, François Hollande n'a pas célébré les deux ans de son accession à l'Élysée. Après plusieurs mois de silence, le Président s'est évertué à renouer le lien avec les Français, mardi 6 mai. "Quelque chose s'est cassé. Il y a un lien qui a été perdu", concédait le porte-porte du gouvernement à la veille de cet anniversaire délicat.

À la faveur d'une interview d'une heure accordée à BFMTV et RMC, François Hollande s'est attelé à retisser ce lien perdu. Il a fait son mea culpa, admettant qu'il n'avait "pas suffisamment dit" que "la situation économique était grave en France" et concédant que s'il avait gagné en 2012, "c'était parce que son prédécesseur avait échoué". 

De retour au premier plan

Le choix de l'émission, au ton, au présentateur et au format populaire, n'était pas anodin. François Hollande a échangé directement avec des auditeurs, pour les convaincre que "le retournement de l'économie arrive", comme il l'affirmait au JDD ce week-end, dans une interview jetant les bases de la dernière ligne droite de son quinquennat. 

Dans la foulée de l'émission, le Président a mis le cap sur Villiers-le-Bel, pour un bain de foule hautement symbolique - sans huées ni sifflets - lui permettant de renouer avec quelques fondamentaux (la jeunesse et la banlieue, notamment) parfois délaissés depuis la campagne présidentielle. 

La veille, il s'était déjà offert une ballade à pied en compagnie du premier ministre japonais Shinzo Abe, le temps de parcourir les 300 mètres qui séparent l'Élysée de l'ambassade japonaise et de glisser au dirigeant nippon que ce type de sorties était devenu "de plus en plus difficile" pour lui. 

Un état de grâce de courte durée

Il faut dire que sa dernière sortie publique ne s'était pas vraiment déroulée comme escomptée. Fraîchement accueilli, François Hollande avait été hué et sifflé à Carmaux, le 23 avril dernier, sur les terres de Jean-Jaurès. Le Président essuyait de plein fouet les ricochets d'une première moitié de quinquennat sanctionnée par une impopularité record. Là où, deux ans plus tôt, il avait prononcé un discours vibrant devant une foule dévolue à sa cause, à quelques encablures du premier tour de l'élection présidentielle.  

Tout avait pourtant bien commencé. De l'élection aux faux airs de sacre mitterrandien le 6 mai, à la vague rose aux législatives le 17 juin 2012, le mandat de François Hollande s'ouvrait sous les meilleurs auspices. Mais un premier accroc est venu sonner le glas de cet état de grâce au creux de l'été. 

Les problèmes économiques se sont enchaînés. PSA a annoncé un plan social d'une ampleur inédite et les tensions à Florange ont fait atteindre des sommets au prix du carburant. Préfigurant les difficultés à venir, un sondage a alors mis en cause la personnalité du Président. Sa côte de confiance s'est effondré et beaucoup de Français ont estimé qu'il n'était pas dans son rôle.

Son autorité en question

"L'impopularité de Hollande n'est pas due seulement à une crise de résultat, notamment sur le front du chômage, mais à son style personnel", souligne aujourd'hui le président de l'institut Polling Vox Jérôme Sainte-Marie, interrogé par RFI. D'une manière générale, le manque de réactivité et de fermeté de sa gouvernance tranche avec le style de son prédécesseur. Et comme les mauvaises nouvelles se succèdent, à l'instar du pari perdu de l'inversion de la courbe du chômage, François Hollande semble ne plus avoir de prise sur les événements et le décrochage se poursuit dans l'opinion.

L'autorité s'est érodée. Sa décision de proposer un billet retour à la seule Leonarda, prononcée lors d'une allocution télévisée, à l'apogée de l'affaire mettant aux prises la jeune Rom, sa famille et l'État français, lui a attiré par exemple une avalanche de critique. La reculade du gouvernement sur l'écotaxe après la fronde des Bonnets rouges et le report de la loi Famille après une énième mobilisation de la Manif pour tous lui ont également valu un procès en amateurisme, que les affaires Cahuzac ou Morelle n'ont pas aidé à dissiper.

Radicalisation de l'électorat de droite, déception à gauche

Dans le même temps, François Hollande s'est éloigné d'une partie non négligeable des Français en menant à terme, contre la pression de la rue et de la Manif pour tous, le projet de loi Taubira instituant le Mariage pour tous. Un électorat qui ne lui était pas acquis mais qui s'est considérablement radicalisé lors de ce débat et s'oppose régulièrement depuis aux actions gouvernementales dans le domaine de la famille. 

Après la déroute des municipales, il a tout remis à plat, clarifié sa politique économique et lancé pour de bon le plan de réduction des déficits publics promis à Bruxelles. Mais il s'est coupé d'une bonne partie de l'aile gauche de sa majorité et de ses électeurs de gauche, qui n'ont pas manqué de le lui faire savoir à Carmaux. 

Le fossé se creuse. Si bien qu'à la veille du deuxième anniversaire de son accession à l'Élysée, trois quart des Français affirmaient ne pas lui faire confiance pour conduire les affaires du pays. Pour l'an III de sa présidence, s'il veut tirer profit d'un éventuel retournement de l'économie, François Hollande devra reprendre la main.

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