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ASE : 3.300 enfants en danger attendent d'être placés faute de moyens

Un rassemblement avait lieu ce mardi 7 mai à Paris pour rendre hommage aux "victimes de l'aide sociale à l'enfance" (ASE), et dont les dysfonctionnements vont faire l'objet d'une commission d'enquête parlementaire.

Un rassemblement a eu lieu mardi 7 mai pour rendre hommage aux "victimes de l'aide sociale à l'enfance" (ASE).
Crédit : Ludovic MARIN / AFP
JUSTICE - Comment 3.300 enfants en danger attendent d'être placés faute de moyens
00:05:39
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Cindy Hubert
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C'est le grand dysfonctionnement de la justice des mineurs : 3.300 enfants en danger - car maltraités par leurs parents, par exemple - attendent d'être placés faute de moyens. Selon une étude du Syndicat de la magistrature, 77% des juges des enfants interrogés ont déjà dû renoncer à prendre des décisions de placement d'enfants en danger dans leur famille en raison d'une absence de place ou de structure adaptée à leur accueil. RTL a pu passer une journée dans le bureau d'une juge pour enfants, à Nantes, pour assister à ce qu'on appelle des audiences d'assistance éducative auprès d'enfants à protéger. 

La juge Marie Le Verre prévient d'emblée : il faut avoir le cœur bien accroché. Le premier cas sur son bureau, c'est celui de Ryan. Ryan se tapait la tête contre le sol. Il mangeait ses excréments. Le papa n'a jamais trop été là. La maman est dépassée. Ryan a été placé en foyer. Mais là-bas, le petit garçon de quatre ans a de nouveau subi des violences. Mordu, enfermé dans le noir, brûlé sur un radiateur. 

Dans le bureau de la juge, tout le monde est présent. La maman en colère, les représentants de l'aide sociale à l'enfance qui présentent leurs excuses. Une enquête est en cours. Mais le plus important, c'est qu'il faut une place quelque part pour Ryan. Il faut qu'on arrête de le trimballer partout, plaide son avocat. Mais pour le moment, il n'y a pas de solution pérenne

Pas assez de places pour accueillir les bébés

Un peu plus loin, au bout du couloir, un mail urgent vient d'arriver à la permanence du pôle famille du parquet. Il faut prendre une décision pour un bébé qui vient tout juste de naître. Sa mère s'apprête à sortir de la maternité. Il faut faire vite : "On a de l'agitation, une difficulté aussi psychiatrique au niveau de la maman qui a l'air assez instable, ce qui forcément alerte dans la prise en charge de son enfant et encore plus dans les nouveaux-nés", explique la juge.

À écouter aussi

Certains bébés attendent pendant des semaines à l'hôpital pour qu'une place se libère en pouponnière, ou ailleurs. "Concrètement, ils sont seuls dans une chambre d'hôpital quand leur état de santé ne le justifie plus, indique Marie Le Verre. Cela peut aussi entraîner des conséquences délétères sur leur développement avec un syndrome qu'on appelle l'hospitalisme et des enfants qui n'arrivent plus à être dans l'interaction avec les autres puisqu'ils sont comme oubliés dans leur lit d'hôpital".

"Ça arrive de plus en plus souvent, argue la juge. Actuellement sur mon cabinet, je crois compter trois bébés qui sont maintenus à l'hôpital depuis plusieurs mois". 

Les services essayent de mettre en place des choses ; font venir des travailleuses familiales quelques heures par semaine pour ne serait-ce que prendre dans les bras cet enfant. Mais pour l'essentiel, il souffre d'un manque de relations et de portage.

Marie Le Verre, juge des enfants

Outre les bébés, pour les plus grands, quand la juge prononce une ordonnance de placement, c'est le conseil départemental qui doit la mettre en œuvre. C'est ce qui s'est passé pour Charlotte. La petite fille a des couettes sur la tête. Elle sourit à la juge en demandant : "Je peux passer Noël chez maman ?" 

Elle est en famille d'accueil depuis sept ans maintenant. Mais tout le monde n'a pas cette chance. Il n'y a pas assez de familles d'accueil, pas assez de travailleurs sociaux. Aujourd'hui, en Loire-Atlantique, il y a 300 décisions non exécutées : "des décisions de placement sur le papier, mais qui ne sont parfois pas mises en œuvre pendant plusieurs mois, voire l'année suivante. On se rend compte que les enfants sont toujours à domicile auprès de ceux dont on a considéré qu'ils étaient un danger tel qu'il fallait une séparation immédiate", détaille Marie Le Verre.

En somme, même si cette juge a décidé de placer des enfants, ce n'est pas appliqué : "ils sont chez eux ou dans des lieux qui ne relèvent pas de la protection de l'enfance, des gîtes qui sont habilités jeunesse et sport, mais qui ne sont pas des lieux de protection de l'enfance", se désole Marie Le Verre. 

C'est décourageant et surtout extrêmement inquiétant pour tous ces enfants que, parfois, on a l'impression d'abandonner

Marie Le Verre, juge des enfants

Une situation identique partout en France ?

Selon le syndicat de la magistrature, qui a fait un sondage auprès des juges des enfants dans tout le pays, plus de 3350 mesures de placement n'étaient pas exécutées en novembre dernier. Plus de 7 juges sur 10 admettent également avoir renoncé à placer des enfants en danger, faute de place. 

Le placement, normalement, c'est la dernière solution. Quand on ne peut plus faire autrement. Avant, la juge tente de mettre en place un accompagnement des familles à domicile. Des travailleurs sociaux peuvent venir sur place donner des conseils très concrets d'éducation, pour être à l'heure à l'école, pour faire des repas. Mais pour que cet accompagnement soit mis en place, les délais sont trop longs : 6 mois, parfois même 1 an. Pendant ce temps-là, à la maison, la situation peut se dégrader.

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