Ils sont plus de 4.500 migrants à avoir pris place dans un bateau qui ne peut en contenir que 320. Nous ne sommes pas en 2017 mais en 1947. Les migrants ne viennent pas d'Afrique ou du Proche-Orient, ils viennent d'Europe. Le Midi Libre revient ce matin sur l'odyssée de l'Exodus. Dimanche, la ville de Sète, dans l'Hérault, va commémorer cet épisode de l'après-guerre.
C’était donc il y a 70 ans, dans la nuit du 10 au 11 juillet. Le navire President Warfield, rebaptisé Exodus par ses occupants, quittait le port de Sète avec à son bord 4.554 juifs rescapés des camps de la mort. Des hommes, des femmes des enfants qui veulent rejoindre la terre promise. Ils n’y parviendront jamais, refoulés par la marine britannique à moins de 30 km des côtes de la Palestine.
L’historien sétois Jean-Claude Santerre veut raviver l'Histoire, empêcher qu'elle ne sombre dans l'oubli. Ce spécialiste du monde hébreu a pu mettre la main sur des documents très rares, tels que des notes des Renseignements généraux français et israéliens de l‘époque. Il rappelle qu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, un million cent mille juifs n'avaient plus d’endroit où aller. Les Nations Unies statuent alors sur des quotas de répartition par pays, et la Palestine, sous mandat britannique, devait accueillir cent mille juifs. Mais le Royaume-Uni refuse.
Le départ de l'Exodus depuis le port de Sète se fait dans la clandestinité, avec la complicité de certains Sétois et aussi du gouvernement français, favorable au départ. Mais le navire est intercepté au large de la Palestine le 18 juillet 1947. Il est pris en étau par deux destroyers anglais. L'Exodus est touché à la proue et prend l'eau. Il y a trois morts et une centaine de blessés.
L'épopée de l'Exodus provoque un émoi international qui va accélérer la création de l'État d'Israël. Le bateau fait demi-tour, revient en France. Les passagers vont attendre un mois à Port-de-Bouc dans des bateaux prison, sans toucher terre. Et puis ils seront envoyés à Hambourg dans un ancien camp de concentration. Sète va se souvenir dimanche. Trois passagers de l'Exodus seront présents pour témoigner.
Une expérience unique en France, racontée ce matin par La Croix : la ferme de Moyembrie, dans l’Aisne, réinsère les détenus en fin de peine grâce à des activités de maraîchage et d’élevage. Une petite route escarpée mène à la ferme. En haut de la côte, le portail est grand ouvert. Ici, personne ne contrôle les allées et venues. Les arbres sont encore enveloppés de brume. Le silence est à peine troublé par le chant des oiseaux.
Entre la traite, les nuits blanches pendant la période des naissances et les épizooties à juguler, la charge de travail est importante, ce qui n'est pas pour déplaire à Alain. Il veille sur les 60 chèvres de la ferme. Comme une vingtaine d’autres résidents en fin de peine (ici, le terme "détenu" est banni), il a intégré l’équipe pour une période de huit à dix mois, le temps de préparer sa sortie. Les résidents sont sélectionnés sur la base du volontariat. Ils ont passé jusqu'à 10 ou 20 ans en prison.
Éric de Villeroché, le président de l’association Ferme de Moyembrie, constate : "Beaucoup de détenus sont lâchés, à la fin de leur incarcération, avec juste un petit sac en plastique contenant leurs affaires. On ouvre la porte de la prison et ils se retrouvent sur le trottoir, sans famille ni lieu où aller". Christian, qui a purgé une peine de huit ans, confie : "J’avais un travail, une compagne… J’ai tout perdu en prison. Mon fils est né pendant mon incarcération, je ne l’ai pas connu. Après, il faut tout reconstruire, ce n’est pas évident."
Âgé de 35 ans, Christian ne voulait pas retourner vivre chez sa mère ni demander de l’aide à sa famille. Il a frappé à la porte de la ferme. La vie à Moyembrie est très encadrée : travail aux champs ou à l’élevage de 8 heures à midi, déjeuner pris tous ensemble dans la salle à manger commune, participation à la vaisselle et au service. Parce qu'il faut structurer le quotidien.
Les résidents bénéficient également d'un accompagnement social pour toutes sortes de démarches administratives. Même balisée, la sortie reste une étape difficile. "Je suis à la fois impatient et inquiet", avoue Stéphane, 45 ans. Libéré à la fin du mois, il ne cache pas sa peur de quitter la ferme : "Ici, j’ai trouvé l’amitié et le travail. Ça va me faire drôle, le premier matin où je vais me lever chez moi, libre !"
Le photographe Niels Ackermann a fait le tour du pays pour photographier les restes de statues déboulonnées au fil des révoltes. C'est à voir et à lire dans Libération. Première photo : dans un village, le mécanicien pense pouvoir refourguer un buste de Lénine en bronze à un ferrailleur pour moins de 3.000 dollars. En attendant, la statue côtoie les carcasses de voitures.
Sur une autre photo, dans un fatras de dons fait à une association qui aide les soldats ukrainiens, un buste doré de l'ancien dirigeant communiste surgit au milieu des cartons et sacs-poubelle. Troisième photo : une tête en marbre de Vladimir Ilitch Lénine est installée sur une jolie pelouse verte taillée. C'est un homme d'affaires étranger qui a voulu de l'exposer devant chez lui !
Libération propose ce matin un numéro spécial à l'occasion des rencontres d'Arles, les Libé des photographes. Le reportage à Mossoul est particulièrement poignant. Une douzaine de clichés, au fur et à mesure que l'armée irakienne libère la ville et chasse l'État islamique. Les habitants revivent, et témoignent. C'est comme la différence entre l'enfer et le Paradis. Messe pour le temps présent.
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