Les tensions entre les États-Unis et la Turquie s'intensifient. À Ankara, le 9 octobre, Recep Tayyip Erdogan s'est dit "peiné" des sanctions prises par Washington, qui a mis un terme à la délivrance de visas non-immigrants pour les ressortissants turcs. Des visas qui concernent les personnes qui se rendent aux États-Unis pour le tourisme, des traitements médicaux, les affaires, un travail temporaire ou des études. En réponse, la Turquie a appliqué les mêmes décisions.
Tout est parti de la détention préventive d'un employé turc du consulat américain, mercredi 4 octobre, accusé par la justice turque d'être lié au prédicateur Fethullah Gülen. Les relations turco-américaines s'enlisent de plus en plus, mais les raisons profondes de la discorde ont d'autres origines, explique à RTL.fr Didier Billion, directeur adjoint de l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) et spécialiste de la Turquie.
Selon le spécialiste, il existe deux raisons principales à ces relations électriques. La première, c'est la question kurde. En Syrie, les États-Unis soutiennent les factions kurdes qui se battent sous le nom de parti de l'union démocratique (PYD). Un "soutient actif" en armes et en argent qui déplaît fortement à Ankara. La Turquie considère en effet ce groupe comme terroriste. Il serait la branche syrienne du PKK, "inscrit comme groupe terroriste par la Turquie mais aussi les États-Unis et l'Union européenne", souligne Didier Billion, selon qui, c'est bien ici que réside la "divergence fondamentale" entre les deux.
"Le deuxième point est important mais pas au même niveau. Il s'agit de la question de Fethullah Gülen", poursuit le spécialiste à l'IRIS. Fethallah Gülen est exilé aux États-Unis depuis 1999. Pour Ankara, il est l'initiateur de la tentative de putsch de juillet 2016 et doit être expatrié. "Washington refuse systématiquement", explique-t-il.
D'autres éléments viennent s'ajouter à ces désaccords, tels que les "négociations entre la Russie et la Turquie à propos de matériel anti-missile". Il s'agit d'un matériel de haute technologie. L'acquérir entre en "contradiction" avec l'armement des pays appartenant à l'OTAN, comme c'est le cas de la Turquie.
La suspension de délivrance de visas d'un côté et de l'autre "montre qu'un pas a été franchi, explique Didier Billion. C'est un jeu de dupes qui sert à faire pression pour ramener l'autre à ses arguments. C'est quelque chose d'important mais qu'il n'y a pas de risque de rupture".
Pas de rupture des relations diplomatiques et stratégiques entre Turquie et États-Unis
Didier Billion
"C'est une question très importante mais ça ne veut pas dire qu'il y aura rupture des relations diplomatiques et stratégiques, martèle-t-il. Les Turcs ne veulent pas partir de l'OTAN et l'Union européenne a besoin de la Turquie dans la région, il y a des intérêts et des divergences".
La situation ne peut pas véritablement s'empirer, d'après lui, si ce n'est par "un rappel des diplomates", un "moyen classique déjà utilisé récemment entre la Russie et les États-Unis", rappelle le spécialiste, qui évoque également des "rétentions économiques" possibles. Des mesures courantes dans ce genre de situation.
Afin de réchauffer les relations turco-américaines, la priorité serait que les États-Unis "baissent l'intensité de leur aide aux Kurdes de Syrie, selon Didier Billion. Mais ils ont trop besoin des Kurdes pour se battre contre Daesh".
Washington a d'ailleurs un comportement paradoxal vis-à-vis des Kurdes. Si elle les soutient en Syrie, elle a condamné l'organisation du référendum le 25 septembre dernier pour la création d'un État kurde en Irak. Pourquoi la possibilité de la création de ce nouvel État la dérange-t-elle ? "Avec un État kurde, c'est une nouvelle couche de chaos qui risque de s'ajouter à celle qui existe déjà. C'est trop dangereux dans la situation actuelle de Moyen-Orient", conclut Didier Billion.
À la suite de ce référendum d'indépendance que le gouvernement central irakien juge illégal, Bagdad a d'ailleurs pris de nouvelles mesures de rétorsion économiques et judiciaires contre le Kurdistan irakien, multipliant les menaces sans toutefois détailler ses décisions.
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