Ce mardi 26 janvier, les taxis manifestent et bloquent la circulation dans les grandes villes. Ils protestent contre les chauffeurs de véhicules de transport avec chauffeur (VTC), qui leur font concurrence, et la guerre s'envenime. L'irruption des VTC a bouleversé l'économie du petit monde des taxis, qui vivait inchangé depuis un siècle. C'est un petit monde avec ses seigneurs : ce sont les grandes compagnies de taxis, comme la G7-Taxis Bleus, fort profitables, bien connectés avec le pouvoir politique. C'est un petit monde avec ses tâcherons : les chauffeurs exploités par ces grandes compagnies. C'est un monde avec ses artisans-taxis : les indépendants qui subsistent. Ils disent avoir perdu 20 à 30% de leur chiffre d'affaires depuis que les VTC sont arrivés. Surtout le prix de la licence qui leur permet d'exercer - ça ne vaut que pour les indépendants - a chuté à cause de cette concurrence nouvelle. Certains ont acheté à crédit, au plus haut (240.000 euros à Paris en 2012, 190.000 aujourd'hui), et c'est cela qui explique leur désespoir.
Les VTC fonctionnent très bien pour deux raisons. D'abord, c'est souvent moins cher que les taxis. Ensuite, c'est plus pratique grâce à l'application smartphone qui permet de commander et de suivre l'arrivée de son véhicule. Plusieurs sociétés sont sur ce marché, de Uber (le leader) jusqu'à Heetch (le dernier-né), un Français qui ne fonctionne que la nuit et qui laisse au client la possibilité de fixer lui-même son tarif. C'est une sorte de covoiturage pour les jeunes. Alors que ces entreprises ont élargi le marché du transport à la demande (elles l'ont démocratisé) et alors qu'elles ont créé probablement une douzaine de milliers d'emplois, elles sont littéralement harcelées par des procès innombrables. La guerre des taxis se joue non seulement dans la rue, mais au tribunal.
Il y a un mois, le gouvernement a suspendu de facto l'attribution des permis VTC. Il y a une réforme en cours, et on attend les décrets qui ne sont toujours pas sortis. Visiblement, le gouvernement n'est pas pressé ; il ne veut pas fâcher les taxis. Les lignes bougent quand même. Il y a quinze jours, le Conseil constitutionnel a rendu une décision importante qui autorise les taxis à devenir eux-mêmes VTC, le temps d'une course, pour compléter leurs revenus, lorsqu'il n'y a pas de clients à la station. Si cette pratique se développe chez les artisans, la guerre pourrait s'apaiser, sinon s'éteindre. Les plus embêtées dans ce cas-là, ce serait les compagnies de taxis, qui imposent jusqu'ici à leurs chauffeurs l'exclusivité. Cela voudrait dire qu'on pourrait être à la fois taxis et VTC. Pour changer de statut, le chauffeur aurait à enlever son signe lumineux sur le toit - c'est une manipulation simple avec un support magnétique - et à afficher une carte VTC. Le système est appliqué dans certaines villes européennes.
Que faire pour aider les taxis qui ont acheté leur licence si cher, en pure perte ? On parle de plus en plus d'un fonds d'indemnisation, alimenté par les nouvelles entreprises de VTC, ou plutôt par leurs clients. Emmanuel Macron, le ministre de l'Économie, en a parlé au fondateur d'Uber, il y a quelque jours, au sommet de Davos. Travis Kalanick lui a répondu que les fabricants d'automobile n'avaient pas payé pour la disparition des chevaux. Au-delà de cette boutade, Uber semble prêt à participer à une telle initiative, tout comme Heetch, qui l'annonçait par la voix de son actionnaire. Reste à voir qui on indemnisera et sur quelle base.
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