Enfant, il voulait être François d'Assise ou Napoléon. Il aura été un peu les deux, le tonitruant général d'une interminable guerre contre la misère et l'injustice. Un homme d'action, à l'évidence. Résistant pendant la guerre, il cache des Juifs, les fait passer en Suisse, fabrique des faux papiers. Dans le maquis du Vercors, Henri Grouès devient l'abbé Pierre.
Arrêté deux fois, évadé deux fois, il poursuivra la bataille comme député, avant de créer Emmaüs. Pour remplir les caisses, il fait la manche à la sortie des théâtres, il joue même à Quitte ou double sur Radio Luxembourg. Et puis, bien sûr, il y a l'appel de l'hiver 54. Cette voix qui devient celle des sans-voix.
"Toujours au bord de l'essoufflement, jamais à bout de souffle", dira Bernard Kouchner. De coup de gueule en coup d'éclat, l'abbé Pierre obtiendra l'interdiction des expulsions l'hiver et la création d'un droit au logement.
Le tout, avec une conception totalement nouvelle de la lutte contre la pauvreté. On a beaucoup parlé de l'insurrection de la bonté, mais l'abbé Pierre n'aimait pas la bonté. Pour lui, c'était de la bonne conscience, de l'assistanat paternaliste. Ses compagnons d'Emmaüs ne vivent pas de la charité, mais de leur travail et ils doivent s'engager à aider les plus pauvres qu'eux.
Et puis leur travail, c'est le recyclage des rebuts. Écolo avant l'heure, l'abbé Pierre prend le contre-pied de la société de consommation. C'est sa nature, c'est un indiscipliné absolu. Tête folle et tête de mule, dit-on. Il corrige : "Trop de coeur et pas assez de tête". En homme libre, il a toutes les audaces, peu de tabou. Se prononce pour l'avortement "quand c'est un moindre mal", contre le célibat des prêtres aussi. Touchant quand il confesse : "il m'est arrivé de céder à la force du désir".
On est bien loin de la spiritualité... Pourtant, l'abbé Pierre était profondément mystique. Chez les scouts, on l'appelait Castor Méditatif. C'est à 14 ans qu'il a eu la révélation, en priant à Assise. Foudroyé, exalté, il se fait moine capucin et reste au cloître pendant 6 ans. C'est sa santé fragile qui l'en fait sortir, puis devenir prêtre. Mais, du couvent franciscain, il a gardé le gout de l'austérité, une certaine sévérité aussi.
Ni fou rire, ni larmes. La nuit, il ne rêve jamais. Sa seule passion profane, c'est l'observation des étoiles. Passion de l'infini et du mystère. La mort, il ne la craignait pas, il espérait un éblouissement. Enfant, il priait même pour mourir jeune.
Son testament, il l'avait commencé dès l'âge de 19 ans. Finalement, il a traversé le siècle, à croire qu'il avait une mission. Et sur sa tombe, on peut lire : "Il a essayé d'aimer".
Portrait de celles et ceux qui ont fait l'actualité tout au long de cette saison.
Bienvenue sur RTL
Ne manquez rien de l'actualité en activant les notifications sur votre navigateur
Cliquez sur “Autoriser” pour poursuivre votre navigation en recevant des notifications. Vous recevrez ponctuellement sous forme de notifciation des actualités RTL. Pour vous désabonner, modifier vos préférences, rendez-vous à tout moment dans le centre de notification de votre équipement.
Bienvenue sur RTL
Rejoignez la communauté RTL, RTL2 et Fun Radio pour profiter du meilleur de la radio
Je crée mon compte