Virginie Bésengez, céramiste : "Je sais que les gens sont bien avec la terre"

"On frappe un tout petit peu comme ça pour enlever les bulles d'air". Dans son atelier de Wambrechies, dans le Nord, Virginie Besengez, céramiste, nous explique de quelle façon elle travaille la terre. Elle a choisi le grès, parce que c'est la terre que l’on trouve dans le Nord de la France. "Inconsciemment on choisit des argiles qu’on a sous les pieds. Aujourd'hui on peut acheter des argiles partout, mais je constate que les gens qui se forment ici sont souvent attirés par le grès".

Des couleurs sourdes et des objets du quotidien, le travail de Virginie tend vers l'essentiel. "J'ai toujours été attirée par les formes simples, pures et par les premiers gestes. À un moment donné, l'homme a dû inventer le contenant, qui est la forme de la main. Un bol, c'est la forme de la main. Je suis en quête de ça, trouver les gestes simples. Il y a très peu de matériel dans mon atelier en fait", dit-elle.

Cette citadine ne recherche pas l'inspiration, mais elle se laisse imprégner par la vie de tous les jours. "J’aime regarder les gens, j’aime les gens, j'aime parler avec eux. Il y a beaucoup de passage à l'atelier. J’habite dans un ville, je me nourris des gens et des maisons, du mouvement, des bruits des villes". 

Un bol, c'est la forme de la main

Virginie Besengez, céramiste

Ainsi, pour une exposition à Tourcoing a-t-elle fait réaliser une structure de la taille d'un abri de bus. "J’ai installé au-dessus de cet abri de bus des pièces, des pots, des céramiques qui évoquaient la position que les gens prennent dans un abri de bus. Tout simplement parce qu'en face l'atelier il y a un abri de bus".

Virginie fabrique aussi beaucoup de petits clous en céramique. Au début elle a commencé cette drôle de collection un peu pour occuper ses mains. "Je faisais des clous quand j’étais au téléphone, j’avais appelé ça, conversation avec l’Urssaf, conversation avec ma mère", raconte-t-elle, amusée.

Un menuisier lui explique un jour que ce petit ustensile si commun est voué à la disparition. Dans la construction et la fabrication, on procède de plus en plus en collant les planches, plutôt qu’en les clouant. Et les usines de clous ferment partout en Europe.

Sérénité

"Je faisais ces petites accumulations de clous, et lui il avait été assez touché par ça. Il m'a dit : 'Il faudrait un jour en faire plus pour rendre hommage à ces clous qui n'existeront plus un jour'", poursuit-elle. Alors dans certaines expositions, Virginie Besengez met en scène de petits tas de clous, qu'elle appelle des accumulations. Curieusement, ces réalisations suscitent les confidences des visiteurs.

"On m’a raconté plein d'histoires autour de ces petits tas. C'est très touchant. Des gens qui ont quitté la maison de leurs parents disparus, qui ont pris un clou, pour qu'il y a ait un bout de la maison avec eux. Un monsieur qui fabriquait des clous et qui a presque pleuré".

À partir du moment où on touche l'argile, on rentre dans quelque chose d'essentiel

Virginie Besengez, céramiste

Virginie a besoin de ces échanges, elle aime aussi partager son art et donne des cours. Elle croit à la sérénité qu'apporte le travail de la terre. "Je sais que les gens sont bien avec la terre. Je l'ai vu aussi avec les enfants, à quel point ça pouvait les calmer. C'est pareil pour les adultes. À partir du moment où on touche l'argile, on rentre dans quelque chose d'essentiel et de fondamental. Le superficiel passe un petit peu après, et ça peut faire beaucoup de bien", explique la céramiste.

Virginie Virginie Besengez vit de son art en vendant ses œuvres à des galeries ou des particuliers. Elle expose en France et à l'étranger. Et pourtant, la magie de la forme qui surgit du bloc de terre reste toujours intacte pour elle. "Depuis quinze ans que je donne des cours, quelle que soit la personne, elle réussit toujours à créer une forme, un bol. C'est fascinant. Je mets la boule dans la main de la personne et tout le monde sait le faire. En fermant les yeux, tout le monde sait créer un contenant. C'est magnifique !", s’émerveille-t-elle.

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