"Ces situations touchent toute l'entreprise". Réagissant à une enquête dévoilée le 6 octobre sur RTL et basée sur des comptes-rendus d'experts, la directrice des Ressources humaines de la branche courrier de la Poste, Line Exbrayat, réagit aux suicides révélés par les rapports et qui selon les experts sont liés au climat délétère dans les emplois qui ont mis fin à leurs jours. Line Exbrayat prend la défense du groupe de 260.000 salariés, "une entreprise en grande transformation et qui voit son activité historique se transformer", justifie-t-elle.
Les experts qui ont mené l'étude sont indépendants. Ils ont été désignés par les comités d'hygiène et de sécurité de la Poste. Leur travail les a menés à alerter le gouvernement sur la situation sociale - qualifiée de "préoccupante" - dans l'entreprise. Ces derniers tirent la sonnette d'alarme et pointent du doigt une "dégradation de l'état de santé des agents".
Certains postiers en sont venus au suicide. Les experts déplorent une série de 9 suicides en 3 ans, et 5 tentatives sur le lieu de travail. Ces derniers pointent "des rythmes effrénés". Mais Line Exbrayat préfère mettre en valeur la "politique humaine" de La Poste, qu'elle présente comme "une entreprise de main-d'oeuvre". "Nous avons une organisation qui se déploie à partir d'organisations tissées autour des hommes. Nous n'avons pas une organisation mécanique, modélisée par des logiciels. La Poste prend en compte l'humain. Nous avons des postes de travail adaptés aux seniors et aux personnes qui ont des inaptitudes", défend la DRH.
Pourtant, les rapports d'experts font état, depuis 2007, de souffrance, de pressions et de cadences infernales. "On a un dialogue social très nourri, rétorque Line Exbrayat. Nous avons 748 CHSCT (Comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, ndlr) qui siègent partout sur le territoire (...). Nous avons à traiter une transformation soutenue par un accord social sans précédent. La Poste de demain, nous allons la créer avec les postiers d'aujourd'hui", avance-t-elle. Mais à quel prix ?
Entre 20 et 40% des tournées sont "intenables" disent les experts. "Nous pouvons avoir à gérer des surcroîts d'activités, des aléas, reconnaît la DRH. Mais dans ces situations nous prenons des dispositions de renfort (...). On se transforme pour les postiers, avec les postiers. Nous avons, sur ces deux dernières années, triplé le volume de formation des facteurs pour les mettre en condition d'exercer leur nouveau métier avec professionnalisme", explique Line Exbrayat.
Pourtant, Charles Griffond, postier à Pontarlier, semble ne pas avoir eu droit à ces formations. Démuni, il a mis fin à ses jours, laissant une lettre dans laquelle ses proches ont pu lire "Ils m'ont totalement détruit". "Le facteur du Doubs est un drame humain. Ça me touche personnellement, mais ce n'est pas notre politique", affirme la représentante des ressources humaines, qui compte "trois suicides reconnus en accidents du travail" sur les trois dernières années. "J'ai décidé d'installer une commission d'écoute où nous allons entendre tous les postiers" annonce Line Exbrayat, dans le cadre du suicide de Charles Griffond.
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