La saison n'avait déjà pas bien commencé pour les terrasses parisiennes du bord de Seine. L'absence de soleil durant les mois d'avril et mai n'a pas encouragé la consommation. Les quais, d'habitude bondés à cette période, avaient du mal à se remplir. La situation a ensuite empiré. L'eau de la Seine est montée. À tel point que les chaises, tables, cuisines et tout le mobilier ont été emportés par le fleuve. Péniches, restaurants, clubs et terrasses ont été sérieusement endommagés voire inondés.
Les dégâts sont impressionnants et les pertes se comptent en dizaines de milliers d'euros pour certains et approchent du million pour d'autres. S'ils sont plusieurs à avoir pu reprendre leurs activités, un grand nombre de commerces ne pourront pas le faire avant des semaines voire des mois. Tous, à différents niveaux, auront du mal à combler le manque à gagner dû à leur fermeture imprévue… Un véritable défi pour ces lieux de fête d'ordinaire très fréquentés.
Le 1er juin dans la nuit, le fleuve parisien déborde sur les quais. Les commerces ont à peine le temps de réagir et sauver ce qu'ils peuvent. Laetitia Di Maccio, chargée de production et animation à La Dame de Canton - un restaurant qui se trouve sur les Quais de la gare dans le XIIIe arrondissement - raconte à RTL.fr : "Le mardi soir, l'eau était déjà à 30 cm du bord. Le lendemain, ça avait débordé." Les employés ont pu essayer de sauver "certains meubles de la terrasse" mais le bilan est désolant : "Les frigos, les fours, la nourriture... Tout est fini. On a annulé tous nos événements. Il faut tout nettoyer, on en a jusqu'au cou". Même son de cloche au Flow, péniche et bar qui s'installe l'été sur les quais des Invalides dans le VIIIe, qui estime les dégâts à hauteur de 200.000 euros et le manque à gagner causé par la fermeture entre 400.000 et 500.000 euros.
On l'a vécue dans la douleur, on subit
Aurélien Dubois, président du groupement des établissements culturels des berges de Seine
"On l'a vécue dans la douleur, on subit, ajoute Aurélien Dubois, président du groupement des établissements culturels des berges de Seine, joint par RTL.fr. Le fleuve est très puissant, il embarque tout tandis que nous, on est spectateurs. On n'était pas du tout préparés." La déception et la peine s'entendent dans la voix des gérants. Parmi les plus touchés, figure le Showcase. Le club parisien qui se trouve sous le pont Alexandre III était dans une zone particulièrement sensible et n'a pas été épargné par la crue. Les images de l'intérieur de l'établissement (cf : notre diaporama) parlent d'elles-mêmes.
Tout est imbibé d'eau
Showcase
Le club est "nu, entièrement nu. Cabines, vestiaires, bars... tout est imbibé d'eau", souffle une personne de l'entourage du directeur du Showcase rencontrée par RTL.fr. Les murs de pierre sont recouverts de boue. D'ordinaire si majestueux, l'intérieur de la boîte fait aujourd'hui mal au cœur. Et la facture de cet établissement réputé pour sa programmation électro est salée. Avec 1.800 m² sinistrés et un taux d'humidité encore à 85%, l'estimation des dégâts atteint presque les 800.000 euros et peut encore gonfler après vérification de l'état du réseau électrique. Le tout sans compter les 3.000 billets remboursés depuis la fermeture le 1er juin, les onze soirées annulées et tout le personnel au chômage technique.
Heureusement, la solidarité était au rendez-vous. Entre péniches d'habitants et de commerçants, il a fallu se soutenir. C'est ce que note Aurélien Dubois, selon qui il y a eu "beaucoup de moments d'entraide". Avec les autres sinistrés du quai, "on se voit, on s'aide. On essaye de faire entendre notre voix d'une même trajectoire", confirme à RTL.fr Laurent Segall, l'un des gérants du Flow. Entre les clubs parisiens aussi. Le Gibus, par exemple, qui se trouve au cœur du XIe arrondissement, a généreusement prêté sa salle pour accueillir un concert prévu au Batofar.
Aujourd'hui, plusieurs bars, clubs et péniches ont partiellement rouvert leurs portes. Les terrasses sont encore dénudées malgré le sol débarrassé de toute l'accumulation de boue. Désormais, les commerçants attendent de l'aide. D'ailleurs, vendredi 10 juin s'est tenue une réunion avec la maire de Paris, Anne Hidalgo, et les représentants du Port de Paris qui s'occupe du trafic fluvial en Île-de-France. Des propositions ont été lancées, comme celle d'annuler les loyers de la période de la crue des établissements touchés. "Mais ce n'est pas suffisant, il y a aussi la période de décrue", réagit Ricardo Esteban, directeur du Petit Bain, joint par RTL.fr.
Nos structures ont souffert et souffrent depuis le 7 janvier 2015
Ricardo Esteban, directeur du Petit Bain
Même si le Petit Bain n'est pas le plus à plaindre - ses pertes sont estimées à 40.000 euros -, "on attend un effort de la part du Port de Paris. On a une vraie attente de la part des pouvoirs publics, de la Ville et de la Région, que l'on pas beaucoup entendue". Et de comparer cette situation à celle des paysans qui reçoivent de l'aide quand la grêle rend la récolte impossible. "Nos structures ont souffert et souffrent depuis le 7 janvier 2015", poursuit-il, évoquant, en plus, la vague d'angoisse qui s'est emparée du pays après les attentats et leurs répercussions sur les salles de concert.
Tous sont donc en train de monter des dossiers pour essayer un maximum d'amortir les pertes. Mais "il sera compliqué" de se remettre, admet-on au Flow. L'heure est au nettoyage pour essayer d'ouvrir le plus vite possible et surfer sur la clientèle touristique présente grâce à l'Euro 2016. Selon Aurélien Dubois, les aides ont du positif "mais ne compensent pas la perte". Selon lui, l'événement sportif pourrait produire cet effet. "On est en train de flinguer la saison. Si déjà on pouvait avoir du soleil...", ajoute-t-il. Car beaucoup de ces établissements sont saisonniers et leur chiffre d'affaires est particulièrement dépendant de la météo.
On est en train de flinguer la saison
Aurélien Dubois, président du groupement des établissements culturels des berges de Seine
Toutefois, le véritable combat du président du groupement des établissements culturels des berges de Seine est de faire en sorte qu'un tel événement ne se reproduise plus. "On a été prévenu à peine 12 heures avant la crue, pas d'autres informations en amont. Résultat, c'était assez compliqué. On n'était pas du tout préparé. Ce qu'il faut, c'est être prévenu plus en amont, avoir un système d'information plus performant. Le débat se porte là-dessus. Si demain, on nous alerte 48 heures à l'avance, on peut tout démonter en 24 heures" et sauver la majorité de ce qui a aujourd'hui été noyé. D'autant que le danger n'est pas totalement éloigné et une nouvelle crue n'est pas impossible. Cette fois, "beaucoup d'établissements pourraient fermer définitivement", assure-t-il.
La situation du Showcase est tellement délicate que les équipes ne savent pas encore quand le club pourra accueillir les fêtards à nouveau. L'établissement doit fêter ses dix ans cette année. C'est peut-être cet événement qui pourra un peu rattraper la situation. "Cette date sera l'occasion de réunir du monde", tout comme le 22 juillet, où Steve Aoki - l'un des DJ's les mieux payés au monde - est annoncé. Au Showcase, on croise donc les doigts pour que l'ouverture soit possible avant cette date, à savoir courant juillet, et l'on promet à la clientèle qu'il n'y aura aucun impact sur les prix des billets. Mais l'épisode n'est pas encore complètement terminé. D'après Aurélien Dubois, "ce ne sera qu'à la fin du mois que l'on saura vraiment l'importance de l'impact de la crue".
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