"On n'en retrouvera jamais un comme celui-là." Quand le sous-préfet Érignac quitte Roanne (Loire) en 1984, c'est un concert de lamentations. Ici comme ailleurs, le jeune fonctionnaire a séduit. Pourtant, il n'a jamais cherché à plaire. Proche des gens, oui : partout où il passe, ce grand sportif s'inscrit dans les clubs de vélo et de tennis locaux.
Mais démagogue, sûrement pas. C'est un homme de dialogue, qui sait écouter. Mais qui n'hésite pas à trancher quand il le faut. Même ses opposants saluent son ouverture d'esprit et son impartialité. Un homme qui en impose. "Il portait l'uniforme sans avoir l'air déguisé et même en civil, c'était le préfet, se souvient le chef étoilé André Daguin. Il était aussi précis dans ses dossiers que dans le réglage des braquets de son vélo."
Il faut dire qu'il est allé à bonne école. Son père déjà était préfet. La famille Érignac vient de la rude Lozère et elle a gravi les échelons en prenant l'ascenseur républicain. Claude Érignac a toujours fait l'aller-retour entre les cabinets ministériels et les préfectures. Une vie de nomade dans laquelle il embarque sa femme, Dominique, et leurs deux enfants. De la Martinique au Nord, de la Nouvelle Calédonie à la Lorraine. Et puis la Corse.
Il n'y allait pas forcément de bon cœur... Mais cette île, il a voulu la comprendre. Il a fini par l'aimer. Il s'est battu pour qu'elle remonte la pente économique, mais il a aussi tenté de faire barrage à des dérives mafieuses. Claude Érignac avait notamment bloqué plusieurs dossiers de casinos.
Il se savait menacé, mais ne voulait pas de protection. Question de principe. Pour un républicain "pur jus" comme lui, il n'y avait pas de territoire d'exception. Alors il n'avait pas changé ses habitudes. Et puis, de la Lozère, il a toujours gardé une certaine austérité protestante. Alors ce soir du 6 février 1998, pour aller au concert, pas question de solliciter son chauffeur. Soirée privée, voiture personnelle.
Une droiture qui lui sera fatale. L'homme qui est tombé ce soir-là aimait la vie, les gens, la joie. Et c'était un homme de culture. Un homme qui n'avait pas manqué de saluer Jacques Brel quelque part au large d'Haïti, un homme qui gardait toujours sur lui un petit carnet pour y noter des citations... Hugo, Lincoln, Malraux, René Char... Et puis cette phrase de Stefan Zweig : "Tuer un homme, ce n'est pas défendre une doctrine, c'est tuer un homme".
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