Tout commence l'après-midi du samedi 14 novembre 2015, le lendemain des attaques. Deux enquêteurs se rendent dans la pizzeria "Casa Nostra", ciblée par les terroristes. Le patron du restaurant fait venir l'installateur de la vidéosurveillance de son établissement. Car lui seul a les codes pour accéder aux enregistrements. Tous visionnent le film des événements. Pour la première fois, le restaurateur "Dimitri" Mohamadi découvre ce qui s'est passé dans son établissement pendant qu'il était absent. Il voit les terroristes vider leurs chargeurs, les clients se jeter au sol, et l'un des tueurs pointer sa Kalachnikov sur deux rescapées.
Trois caméras ont saisi la scène. Les policiers repartent avec la vidéo sur une clé USB. Le patron de la pizzeria n'a plus les moyens de faire une copie. Mais à force de recevoir des propositions d'argent liquide de médias du monde entier, il prend vite conscience que ces images valent de l'or. Dans les auditions que nous avons pu consulter, le restaurateur avoue même avoir dormi près du disque dur pour "éviter de se faire voler la vidéo".
Ces images ont été vendues pour la somme de 50.000 euros. Il a fallu faire appel à un hacker, pour accéder aux vidéos, et à un traducteur, pour les négociations avec les Britanniques du Daily Mail, qui ont décroché l'exclusivité des images (le journal l'a reconnu). À qui a été reversée cette somme ? "Pas à moi, à mon 'cousin', enfin une de mes connaissances", s'est défendu le patron de la pizzeria au micro de RTL. "Je n'ai pas accepté l'argent, c'est de l'argent sale. Je me suis dit que si je prenais cet argent sur le sang des morts, comment j'aurais pu vivre cela toute ma vie ?", a-t-il déclaré.
Sauf qu'au procès, le 26 avril, sera opposée au restaurateur une autre vidéo, tournée dans son restaurant mais à son insu : les images de la transaction, filmées en caméra cachée par un journaliste français, qui a assisté aux négociations dans la cave. On y voit, selon Libération - qui a visionné les cinq heures de rush -, le "cousin" et le hacker mener les négociations, et le restaurateur s'asseoir devant les enveloppes gonflées de billets remis par les Britanniques. Le journaliste, qui a filmé et qui n’est pas poursuivi par la justice, affirme qu'ensuite le patron de la pizzeria lui a proposé un rail de cocaïne.
Que reproche précisément la justice au patron, au "cousin" et au hacker ? C'est intéressant, car ce qui nous choque le plus c'est qu’ils aient pu s'enrichir avec le 13 novembre. Ce n'est pas ce que la justice retient. Ce qui leur ait reproché, c'est d’avoir donné accès à des images de vidéosurveillance à des personnes non autorisées, autres que des policiers ou des pompiers.
Le restaurateur aurait donné gratuitement ces images, le procès aurait quand même eu lieu. "Il faut une condamnation exemplaire, que ceux qui disposent de telles images, à l’avenir, sachent qu’il est hors-la-loi de les distribuer", demande Ambroise Soreau, l'avocat des trois clients du restaurant qui ont porté plainte.
"S'il une telle jurisprudence est établie, si des images de vidéosurveillance qui apportaient une information au public sont interdites, le droit d’informer en France sera en danger", réplique d'avance Jeffrey Schinazi, l'avocat du patron du restaurant. Derrière le procès du business sordide du 13 novembre, se cache un débat juridique qui pourrait faire date.
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