Il aura été "K.O." à peine seize jours. Seize jours après l'annonce du jugement de la Cour d'appel de Paris le condamnant à verser 405 millions d'euros perçus en 2008 à la suite d'un arbitrage privé dans le cadre de l'affaire qui l'opposait au Crédit Lyonnais, Bernard Tapie a annoncé son retour en politique le 20 décembre.
Cette annonce, largement développée dans les colonnes du JDD, est-elle une réponse à sa condamnation ? Bernard Tapie ne s'en cache pas. Dans un entretien au journal Le Monde du 3 décembre, l'ancien patron d'Adidas n'en démordait pas. "Ils veulent la guerre, ils vont l'avoir", déclarait-il avant de pointer une responsabilité de l'État dans cette affaire. "C’est à eux, et à eux seuls, que revient la capacité, par l’intermédiaire du CDR [Consortium de réalisation], de corriger la décision invraisemblable des juges. Là, c’est l’État, donc M. Macron. Si le gouvernement dit "je m’en lave les mains", c’est qu’il est derrière la décision."
"Nanard" revient l'esprit animé par la revanche mais avec un plan - le "Plan Tapie 2016" - dans lequel il recycle des idées anciennes, celles qu'il avait lui-même portées dans les années 1990 lorsqu'il était ministre de la Ville. Sa mesure phare est d'interdire le chômage des jeunes. Bernard Tapie propose de l'éradiquer à coût constant "en réinvestissant tous les fonds actuellement engloutis dans des formations et programmes inefficaces. En particulier, en dispensant des formations pour des métiers dont le marché du travail a besoin. Je dis que tout l'argent doit être intégralement consacré à la mise en activité des jeunes."
Une mesure que Bernard Tapie avait déjà proposée en 1992, lorsqu'il a été l'éphémère membre du gouvernement de Pierre Bérégovoy. "À l'époque où j'étais ministre de la Ville, j'avais même présenté un projet de loi pour rendre le chômage des jeunes illégal. Que n'ai-je reçu comme critiques à l'époque pour ce texte jugé populiste. C'est un combat que je veux reprendre aujourd'hui".
Pour L'Humanité, la réforme "ressemble un peu à du travail obligatoire…" Aujourd'hui, un jeune sur quatre est au chômage contre 10% de la population active. Une des conséquences directes du caractère obligatoire du travail des jeunes serait d'accepter une offre bien en deçà de ses compétences. Or, un jeune sur trois est déjà surqualifié pour son emploi, selon un rapport des chiffres du Conseil économique, social et environnemental publié en mars 2015.
Au cours de l'entretien au JDD, l'ex patron de l'Olympique de Marseille cite un autre adversaire : le Front national. À l'écouter, il serait l'homme de la situation pour le combattre. "Personne ne peut contester mes succès passés face au Front national, notamment aux européennes de 1994, quand je l'avais ramené, comme je l'avais promis, à 10% des voix. C'est toujours faisable à condition d'adopter les bonnes méthodes." Aux élections européennes, la liste conduite par Bernard Tapie a été créditée de 12,03% (liste Énergie radicale), seulement deux points et demi derrière la liste de Michel Rocard (Parti socialiste européen) et devant la liste de Jean-Marie Le Pen (10,52%).
Le Front national, qui avait fait son entrée à l'Assemblée nationale en 1986, a toutefois augmenté son score. Il avait recueilli 9,65% des voix en 1986. Il est difficile de comparer les scores du Front national des années 1990 porté par Jean-Marie Le Pen à ceux de sa fille, Marine, aujourd'hui. Le parti d'extrême-droite ne s'était pas encore retrouvé au second tour de l'élection présidentielle (2002) et n'avait jamais remporté d'élections (européennes 2014).
Bernard Tapie conserve un atout : sa personnalité. À 72 ans, l'ancien député PS des Bouches-du-Rhône n'a rien perdu de son charisme et de sa grande gueule. Reste à savoir si cela sera suffisant pour incarner le nouveau souffle que les Français semblent réclamer dans la vie politique. Selon un sondage publié par Le Parisien, les candidatures de François Hollande et Nicolas Sarkozy à la présidentielle sont respectivement rejetées par 80% et 78% des sondés.
Dernière question : sur quels moyens Bernard Tapie peut-il compter ? La politique coûte cher sans le soutien d'un parti. Les aventures en solitaire sont rarement couronnées de réussite. Selon l'éditorialiste, Yves Thréard, "il ne peut espérer qu'une chose en jetant ce pavé dans la mare : le renfort de Xavier Niel, Marc Simoncini et de tous les papes de la nouvelle économie déjà engagés dans la formation des jeunes. Mais ont-ils besoin de lui pour lutter contre le chômage ? Tapie ferait mieux de se concentrer sur son recours en cassation contre le Crédit Lyonnais, car là il peut encore gagner."
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