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Mort de chefs jihadistes en Syrie : entre rumeur et intox, le casse-tête des renseignements

Face à la difficulté de récolter des informations fiables sur le terrain, les services secrets mettent parfois des années à retrouver la trace de leaders jihadistes, qui ont souvent intérêt à se faire passer pour morts.

Des combattants de l'État islamique (photo diffusée sur le compte Twitter jihadiste Al-Baraka news le 11 juin 2014) (archive).
Crédit : ALBARAKA NEWS / AFP
La rédaction numérique de RTL & AFP
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Entre rumeurs et intox, s'assurer de la mort d'un chef jihadiste, en Syrie ou ailleurs, est un casse-tête sur lequel les services de renseignement butent parfois des semaines, des mois, voire des années, reconnaissent d'anciens cadres des services français.

Depuis samedi, les réseaux sociaux évoquent la mort, non confirmée à ce stade, d'Omar Diaby: sous le pseudonyme d'Omar Omsen, ce dernier a créé une katiba (cellule) francophone en Syrie et mené une intense campagne de recrutement sur internet. "Des vérifications sont en cours, qui ne sont pas faites uniquement par mes services", a indiqué lundi le ministre français de l'Intérieur Bernard Cazeneuve à l'AFP, notant que l'homme est considéré comme un "recruteur très important" de jeunes Français.

Confirmer la mort ces gars-là, dans ces coins là, on ne sait pas faire

Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité à la DGSE

De telles annonces sont cependant fréquentes. Ainsi, depuis le mois de mai, c'est le décès de Said Arif, un Algérien vétéran du jihad afghan, autrefois assigné à résidence en France, d'où il s'est échappé, qui est régulièrement avancé sur la toile. Auparavant, la mort du français David Drugeon, jeune converti ayant rejoint les rangs d'Al Qaïda en Afghanistan puis en Syrie, avait été jugée probable, lors d'un raid de drone américain, avant d'être infirmée.

"En fait, c'est très simple : confirmer la mort ces gars-là, dans ces coins-là, on ne sait pas faire", assure Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité à la DGSE (renseignements extérieurs français). "Il faudrait pouvoir collecter de l'ADN ou recouper des témoignages fiables. Mais dans ce genre de cas, on ne les a pas. Et on ne les aura pas".

L'infiltration : une mission parfois trop dangereuse

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Les régions contrôlées par le groupe État islamique ou les organisations affiliées à Al Qaïda en Syrie et en Irak sont hors de portée des agents secrets étrangers : le danger d'y opérer directement est trop grand, les exécutions d'espions présumés nombreuses. "Au niveau de l'accès sur le terrain, je ne pense pas que nous en ayons, que qui que ce soit en ait" estime Alain Chouet. "Beaucoup trop dangereux. Il ne faut pas raconter de sornettes, on n'a personne. Donc aucune capacité d'investigation ou de recoupement". 

L'ancien chef d'un service de renseignement, qui demande à rester anonyme, confirme : "Infiltrer des agents qui pourraient nous contacter pour nous dire 'il est vivant, je l'ai vu' : c'est impossible, trop dangereux. La vraie vie, c'est pas comme au cinéma. Au mieux, on peut parler à des genres d'agents doubles. Des gens qui vont, parfois sans savoir à qui ils parlent vraiment, donner des informations. Et il y a ceux (les jihadistes) qu'on peut débriefer quand ils rentrent en France, s'ils acceptent de parler..."

Faute de sources directes? les services surveillent, bien entendu, tout ce qui s'écrit ou se poste sur internet. Ils stockent, classent, tentent de recouper grâce à leurs capacités d'écoutes, d'interception et d'observation. "On rassemble des faisceaux d'indices : par exemple les numéros de téléphone. On les surveille. S'il y a tout à coup un silence, il est peut-être mort", ajoute la même source. "Mais ils ne sont pas cons, ils savent qu'ils sont écoutés. Ils se méfient, passent en mode 'silence radio'. On essaie d'avoir d'autres indications sur le fait qu'ils sont encore en vie ou pas, en surveillant leurs proches. Mais ce ne sera jamais une science exacte".

Certains jihadistes "ont intérêt" à se faire passer pour morts

"Dans les services, on est toujours très très circonspects. Quand j'étais en fonction, il y en avait deux ou trois qu'on pistait, on était très prudents. Même si on avait la quasi-certitude que le type était mort, pour nous il ne l'était pas tant qu'on n'avait pas vu le cadavre ou qu'on n'avait pas croisé l'ADN", poursuit-il. "Ce fut le cas avec Ben Laden : les Américains avaient le corps, mais ils ont collecté l'ADN d'un membre de sa famille pour être sûr que c'était lui et pas un sosie..." La vérification par un témoignage fiable ou une preuve matérielle est d'autant plus cruciale que certaines cibles peuvent avoir intérêt à faire croire à leur mort, estime Alain Chouet.

"Étant donné que l'EI commence à perdre pied sur le plan militaire, un certain nombre d'étrangers, Français, Anglais ou Tchétchènes, ont tout intérêt à se faire passer pour morts, pour pouvoir disparaître", dit-il. "Ils peuvent demander à leurs copains de rapporter sur les réseaux sociaux : 'le pauvre il est mort'. Ça peut tout à fait être une manip". "Regardez l'exemple du mollah Omar : la rumeur de sa mort circule depuis dix ans. Il est peut-être mort... En fait, la seule chose qu'on peut affirmer, c'est qu'un de ses jours, ce sera vrai..."

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