Isabelle Morini-Bosc : "Un village français en-dessous des 3 millions de fidèles, c'est décevant"

Je suis déçue mais déçue, vous n'avez pas idée ! Oui, je suis carrément ouvertement totalement déçue par l'audience de la série Un village français saison 6...Ce résultat (on l'espère temporaire) amène d'ailleurs à une analyse fine -pardon, affinée- des divers scores. Que le Mentalist (dont la DS dort toujours dans le garage de TF1) ait rassemblé 8.500.000 téléspectateurs, c'est logique. On ne refuse pas une "der des der" parfaitement "aboutie" au bout de 7 saisons et 150 épisodes ! Réjouissante également, la 2ème place de La France a un incroyable talent qui, avec sa demi-finale hier, attire 320.000 téléspectateurs de plus qu'en 2014 ! Un demi-succès, c'est comme un demi-de-bière, "ça se prend"!

Mais que Le Village français soit ensuite en-deçà, en-dessous des 3.000.000 de fidèles sur France 3, voilà qui est décevant ! Ce score est-il lié à une diffusion chaotique pour cause de délais de production (le temps d'imaginer de tourner de monter la suite)?... Possible. D'où l'impression (erronée) donnée à un éventuel "nouveau public" que ce programme n'est pas pour lui, qu'il ne pourra pas prendre le train en marche, celui pour Villeneuve ? Quelle qu'en soit la raison, c'est dommage : il y a en effet tout dans cette fiction lancée en 2009 et qui raconte les années 40-45, soit 12 épisodes par année d'occupation. Ce récit est même une référence, qui raconte le quotidien des habitants de Villeneuve, un village jurassien où les habitants sont très "occupés" et se montrent globalement aussi peu "résistants" au froid qu'aux Allemands.

Un feuilleton vendu à 30 pays

Sauf que Villeneuve étant proche de la suisse, il s'y passe autant de choses qu'il y passe de gens. Mais cette saga montre avant tout que ce sont souvent autant les circonstances que les dispositions de nature qui font de nous des héros ou des salauds...Qui aurait dit que le patron de la scierie, qui n'était pas du bois dont on fait justement les héros, s'"opposerait aux boches" à l'heure où, scierie ou pas, ça "sentait le sapin" ? Que le chef de la police de Vichy, Marchetti, tuerait finalement des teutons et des miliciens par haine de la lâcheté et par passion pour une juive ? Cette "complexité" humaine était particulièrement criante hier, en septembre 44, avec le départ des Allemands, l'arrivée des faux résistants, à cette heure confuse "entre chiens et loups" : on plaignait ainsi l'ex-maire Larcher, un médecin comme il faut et surtout comme il en faut, accusé de collaboration par ceux qui l'avaient supplié de parlementer avec l'occupant pour leur bienfait à eux, les administrés.

Accusé aussi d'avoir soigné les 2 camps. On avait même de la compassion pour sa femme, une égoïste magnifiée par la douleur d'avoir perdu son grand-amour-allemand. Oui, elle était troublante, cette heure trouble où des humanistes étaient acculés à la compromission, où de nombreux libérateurs devenaient les bourreaux d'autres bourreaux qu'on se surprenait à ne plus haïr autant qu'on l'aurait dû... Les frontières devenaient moins nettes. À tous les sens du terme. On en admirait d'autant plus ceux qui restaient debout...et j'en admire d'autant plus ce feuilleton déjà vendu à 30 pays, à qui le public donne la note "qualitative" de 8,6 sur 10. Fin de l'aventure (la Libération) en 2016, après quoi le public sera nettement moins...occupé!