Le site de location Airbnb peut-il tuer l'hôtellerie française ? Roland Heguy, de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH) et l'économiste Nicolas Bouzou étaient les invités d'Yves Calvi jeudi 12 novembre.
"Depuis quelques années, en France, il y a plus de 8.000 hôtels, surtout les hôtels dans les territoires ruraux, qui sont en difficulté", alerte Roland Heguy. Une situation qui mène, selon lui à "un plan social invisible", une situation où les hôtels mettent la clef sous la porte et licencient leurs salariés.
Mais cette perte de dynamisme de l'hôtellerie est tout de même un phénomène plus ancien : quelle est la part de responsabilité d'Airbnb ? "Ce que nous demandons, c'est l'équité, les mêmes règles", appuie Roland Heguy. "Tous les villages au pays basque sont concernés par Airbnb. Pourquoi ? Parce que ça s'est industrialisé. Et on ne peut pas accepter qu'il y ait des multipropriétaires qui ont plus de 500 appartements sur ces plateformes, et qui sont en location à la nuitée", poursuit-il.
Alors que la France vit du tourisme, que Paris est la capitale la plus visité d'Europe, que faire face à Airbnb ? "D'abord, on ne l'empêchera pas", tranche Nicolas Bouzou. "En réalité, Airbnb n'est pas une entreprise d'hébergement, c'est une entreprise du numérique, de la même façon qu'Uber n'est pas une entreprise des transports mais une entreprise du numérique", décrypte-t-il.
Airbnb crée énormément d'emplois indirects
Nicolas Bouzou, économiste
Mais alors que l'hôtellerie en France embauche des milliers de personnes, Airbnb ne crée que 30 emplois. "Trente emplois directs", rectifie Nicolas Bouzou. Car selon lui, Airbnb créé aussi des emplois indirects, que l'on ne voit pas forcément. Et crée aussi de la richesse supplémentaire pour le pays. "Quand un hôte Airbnb loue son logement, il gagne 3.000, 4.000 euros de plus par an et ça, c'est de l'argent qui va être dépensé. Et puis les touristes vont rester plus longtemps dans un pays si le coût de l'hébergement est moins cher. Résultat : plus d'argent dans le restaurant, dans les musées, les transports publics".
Mais comment de l'emploi peut-il être créé à partir de ces changements ? "Quand vous avez de l'innovation, vous avez toujours ce phénomène "d'innovation destructrice", des créations d'emplois diffuses qu'on ne voit pas face à des destructions d'emplois dans l'hôtellerie que l'on voit", estime Nicolas Bouzou.
Que révèle, au fond, la question d'Airbnb face à l'hôtellerie française ? Selon l'économiste, elle révèle que le vrai sujet est celui d'une "adaptation, de mutation et de convergence des règles". Règles qui, selon lui, auraient tout intérêt à ne pas être alourdies sur l'économie du partage et l'économie collaborative, mais qui pourraient servir à alléger "la fiscalité et la réglementation sur l'hôtellerie".
Selon l'économiste, la concurrence d'Airbnb est uniquement technologique. "Si demain, vous avez un économiste chinois qui est plus intelligent que moi et qui peut intervenir sur RTL via Skype, je vous promet que je n'irai pas voir le gouvernement pour me plaindre d'une concurrence déloyale". Rolland Héguy dénonce de son côté la concurrence des multipropriétaires. "La plateforme n'est pas déloyale, ce sont les produits qui trompent la clientèle. Michel a 40 appartements : comment voulez-vous qu'il vous reçoive tous les matins ?", interroge le président de l'UMIH.
C'est une chance extraordinaire pour les hôtels, parce qu'au fond, c'est la concurrence qui améliore le service
Nicolas Bouzou, économiste
Comment gérer cette situation pour éviter que des milliers d'employés de l'hôtellerie se retrouvent sans emploi ? "Oui, votre boulot va être complètement bouleversé, oui, vous avez des hôtels qui vont disparaître, mais en même temps c'est une chance extraordinaire pour les hôtels, parce qu'au fond c'est la concurrence qui améliore le service", affirme l'économiste, provocateur. "On ne peut pas accepter qu'il y ait des millions et des millions de chômeurs supplémentaires en disant que ça va s'inscrire dans d'autres métiers", réplique le président de l'UMIH.
"Une crise d'adaptation, ça dure quand même 10 - 15 ans", affirme Nicolas Bouzou. "L'âme de notre pays, ce n'est pas tant l'hôtellerie que le patrimoine et le tourisme. La question, c'est comment est-ce qu'on le satisfait au mieux ?
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