"On se demande ce que les écolos ont encore à faire ensemble", dit Alba Ventura

Après le communiste Pierre Laurent, c'est Cécile Duflot qui signe une lettre au vitriol dans le journal Le Monde. L'ancien ministre (EELV) parle d'un "Waterloo moral" pour qualifier la politique d'immigration du gouvernement. Elle y va fort dans ce courrier qu'elle adresse directement à François Hollande.

Il faut être honnête. On ne peut pas accuser Cécile Duflot de faire de la politique politicienne sur le cas des migrants. Elle a toujours été constante sur ces sujets-là. Elle avait déjà fait une sortie brutale contre les propos de Manuel Valls sur les Roms, quand il avait dit que les Roms n'avaient "pas vocation à s'intégrer en France". Elle avait accusé le Premier ministre de "mettre en danger le pacte républicain" (c'était une charge très violente). Elle l'avait aussi critiqué sur sa politique de regroupement familial.

Réaction épidermique

C'est l'un de ses premiers engagements, bien avant l'écologie. Elle a milité à Jeunesses ouvrières chrétiennes, elle a toujours défendu les sans-papiers. On ne peut donc pas dire qu'elle utilise l'actualité, même si ça lui donne clairement une tribune.

Disons qu'en première intention, elle réagit de manière épidermique parce que ça la touche. Elle considère qu'il y a une ligne jaune pour la gauche, et qu'il ne faut pas la franchir.

Cécile Duflot écrit beaucoup en ce moment, ou du moins elle signe des courriers. Elle vient notamment d'apposer son paraphe, avec la moitié des députés écolos, sur une lettre explosive, destinée à remettre en cause les deux coprésidents du groupe Europe Ecologie les Verts à l'Assemblée, jugés trop pro-gouvernementaux. Là, ce n'est pas une lettre contre François Hollande ; c'est une lettre contre les Verts qui aiment bien François Hollande.

Dans la famille des hollando-compatibles, ça ne fait pas de doute : c'est Cécile Duflot qui est derrière cette lettre. C'est une manière pour elle, disent-ils, de tenter de prendre le contrôle des Verts à l'Assemblée. Comme elle est persuadée d'avoir la base des militants avec elle, elle cherche aussi à avoir la main-mise sur les députés écolos.

Crises à répétition

On a eu mercredi 10 juin un exemple de la tension qui règne, avec le tacle de François de Rugy. Le coprésident du groupe des Verts à l'Assemblée, visé justement par les lettres, a déclaré à propos de la démarche de Cécile Duflot sur l'immigration : "L'approche morale de l'immigration parfaitement compréhensible ne résout pas tout".

Vous voyez qu'à nouveau les écologistes sont en train de se tirer dans les pattes les uns les autres. Ce n'est peut-être pas significatif, mais depuis la semaine dernière, une poignée d'élus écologistes a décidé de quitter le parti, qu'ils trouvent "trop sectaire". Certains parlent d'un parti "déliquescent".

Même Jean Vincent Placé, le puissant patron des sénateurs écologistes, ne sait plus bien s'il a un avenir au sein des Verts. Ce n'est pas rien. Il ne mâche pas ses mots quand il parle des écolos. "C'est comme dans un labyrinthe, dit-il. À force de prendre les mauvais chemins, on se retrouve dans une impasse".

On ne peut plus dire que les Verts traversent une crise de croissance

Alba Ventura

Est-ce que l'on peut affirmer que les Verts vont tout droit vers la scission ? C'est toujours difficile avec eux de dire qu'ils iront jusque-là, notamment chez les parlementaires. N'oublions pas qu'un groupe de députés, c'est quinze personnes. S'ils se scindent en deux, c'en est fini de l'étiquette "Europe Écologie" à l'Assemblée. C'est sûr, ça fait réfléchir.

Seulement, on ne peut plus dire que les Verts traversent une crise de croissance. Non, ils vivent des crises à répétition. On voit bien que chacun essaie de construire dans son petit coin sa petite offre politique. Duflot d'un côté, Placé de l'autre. On voit bien que les Français qui ont une sensibilité sur les questions d'environnement ne se reconnaissent pas dans ce parti.

Alors forcément, on se demande ce que les écolos ont encore à faire ensemble.

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