Il y a dix critères très précis de pénibilité (travail répétitif, port de charges lourdes, exposition au bruit, aux vibrations...). Quatre ont déjà été définis. Les autres le seront par ces décrets. Les salariés exposés à ces nuisances pourront bénéficier d'un bonus de cotisation de retraites, qui leur permettra de partir jusqu'à huit trimestres avant l'âge légal avec une pension complète, c’est-à-dire avec une retraite anticipée de deux ans.
Au départ, le gouvernement avait imposé à l'employeur de mesurer précisément l'exposition de chaque salarié. C'était absolument infaisable. La loi Rebsamen de cet été a un peu simplifiée les choses. On va créer des fiches métier qui aideront les employeurs. Par exemple, dans le bâtiment, un couvreur, ça sera tant de points, correspondant au métier standard.
À terme, un salarié sur quatre sera concerné. C'est considérable, et cela pourrait coûter des milliards d'euros au régime de retraite. Même si l'intention est bonne, il y a plusieurs effets pervers. Comme c'est l'employeur qui décide, il pourra être tenté d'accorder un régime favorable à ses salariés plutôt que les augmenter. Dans une petite entreprise, le risque est grand que tout le monde soit aligné sur le régime le plus intéressant, car ce n'est pas facile de différencier les salariés.
Quand bien même le patron s'en tiendrait aux fiches métiers, ce sont au fond de nouveaux régimes spéciaux qui sont créés. Régimes spéciaux qui seront impossibles à modifier, même si les conditions de travail s'améliorent. C'est le cas des régimes spéciaux actuels, celui de la SNCF, par exemple, qui n'a plus de justification, et qui coûte plus de 3 milliards par an au contribuable.
Cela a donné lieu à longues tractations. Avec des résultats quelquefois baroques, comme pour l'exposition à la poussière de bois. Le seuil retenu pour donner droit à une bonification est de 0,2 gramme par mètre carré - c'est vingt-cinq fois plus exigeant que la norme européenne. Cela veut dire que l'intégralité de l'industrie du bois aura son régime spécial.
Il y a quand même des métiers avec des conditions de travail objectivement difficiles, avec un impact sur la durée de vie. Un cadre de 35 ans a, par exemple, 13% de chances de mourir avant 70 ans, alors qu'un ouvrier, c'est 27%, selon l'Insee. L'écart est du même ordre pour une femme. Nombre de pays européens ont donc créé aussi des régimes de pénibilité. Mais c'est habituellement un organisme extérieur à l'entreprise qui évalue les salariés et les risques professionnels, c'est beaucoup plus sain. Par ailleurs, face à ces inégalités de santé, la vraie réponse de long terme, c'est la prévention. Et dans notre nouveau système, il n'y a pas d'incitation à la faire.
Pourquoi s'est-on alors lancé dans un tel dispositif ? D'abord par nécessité de rallier la CFDT, le seul syndicat qui acceptait l'idée de réformer les retraites, et qui voulait en contrepartie une prise en compte de la pénibilité ; ensuite, il y a la propension française à bâtir des dispositifs inapplicables, parce qu'ils ont germés dans l'esprit de hauts fonctionnaires tout aussi brillants que déconnectés de la réalité de l'entreprise.
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