Si vague de libération de la parole des femmes victimes de violences
a gagné de nombreux pays, elle est restée limitée au Japon où seuls quelques
témoignages ont émergé. Au pays du Soleil-Levant, les victimes de tels actes
sont plutôt encouragées à se taire.
L'affaire du producteur hollywoodien Harvey Weinstein a été
couverte par les médias japonais, mais peu se sont penchés sur des situations
potentiellement similaires dans l'archipel asiatique. Quasiment aucune femme du
monde du spectacle n'a pris la parole.
Ha-Chu, auteure et blogueuse, est l'une des exceptions. Elle
a relaté en décembre avoir été harcelée par un responsable de la création du
groupe de publicité Dentsu, Yuki Kishi, lorsqu'elle y travaillait. Son
témoignage a été relayé par plusieurs médias et Yuki Kishi s'est publiquement
excusé.
Après avoir travaillé pour Dentsu, il avait fondé sa propre
société et a annoncé, à la suite de ces révélations, qu'il allait démissionner,
expliquant "éprouver une grande responsabilité (...) pour avoir suscité de
l'émoi dans l'entreprise". Au Japon, où la société reste teintée d'un
certain patriarcat, dénoncer ce genre de violences n'est pas sans conséquences.
Shiori Ito a payé le prix fort lorsqu'elle a raconté son
histoire l'an dernier. Cette journaliste de 28 ans a accusé un homme de
télévision de l'avoir droguée et violée en 2015 après l'avoir invitée à un
dîner professionnel.
Pour avoir rendu son histoire publique, notamment dans un
livre titré Black box (Boîte noire), elle a subi un flot d'attaques sur internet.
"J'ai reçu des messages me traitant de salope, de prostituée", se
souvient la journaliste, qui s'est récemment exprimée au siège des Nations
unies.
"J'ai aussi reçu des menaces et j'ai craint pour la vie
de ma famille", confie-t-elle. La
journaliste a également déploré un examen médical qui a tourné à
"l'interrogatoire", et dénoncé l'attitude des policiers, qui lui ont
demandé de mimer son viol, une poupée grandeur nature représentant son
agresseur présumé.
"Le mouvement #MeToo a sans aucun doute déclenché des
prises de parole", souligne Sachi Nakajima, elle-même victime de violences
conjugales et fondatrice de l'ONG Resilience, qui vient en aide aux victimes. Toutefois
l'histoire de Shiori Ito "n'a pas créé de basculement. Rien ne se passe,
personne n'est arrêté, même dans son cas", regrette-t-elle. Sachi Nakajima
met en cause la loi japonaise centenaire sur les crimes sexuels, que le
Parlement n'a réformée que l'an dernier pour élargir la notion de viol et
renforcer les sanctions.
En 2017, seul un tiers des procédures pour viol ont été
renvoyées devant un tribunal et sur les 1.678 personnes jugées, seules 285 ont
été condamnées à plus de trois ans de prison, selon des chiffres du ministère
de la Justice. Et selon un sondage réalisé par le gouvernement en 2017,
seulement 2,8% des victimes de viols ont dit en avoir parlé à la police, tandis
que 58,9% n'en avaient parlé à personne, pas même à des amis ou à des membres
de leur famille.
Au Japon, "beaucoup d'hommes pensent que le corps des
femmes leur appartient", constate Sachi Nakajima, estimant que dans ce
pays "la définition du consentement est complètement faussée". "Si
vous allez dans un commissariat pour dénoncer un cambriolage, on ne vous dit
pas 'pourquoi n'étiez-vous pas chez vous à ce moment-là ?'. C'est tout aussi
absurde de dire : 'vous devez l'avoir provoquée'", s'indigne-t-elle.
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