La BNF et le Centre Pompidou célèbrent Anselm Kiefer, artiste infatigable

Il est l'un des plus importants et des plus célèbre artistes allemands contemporains. Il s'appelle Anselm Kiefer. Paris l'honore doublement cet hiver : la Bibliothèque nationale de France expose pour la première fois ses livres-sculpture et le centre Pompidou lui dédie une grande rétrospective qui englobe 50 ans de création.
L'occasion de découvrir l'œuvre de cet artiste, né en Allemagne en 1945, et dont la démarche répond à une interrogation essentielle : comment faire œuvre après Hitler. Anselm Kiefer est doué. Dès à l'âge de 9 ans, il écrit des poèmes et les illustre par des dessins. Vous pourrez les voir et les lire à la bibliothèque nationale. Plus tard, il fabrique des livres à un seul exemplaire qui pèsent parfois des centaines de kilos chacun, ils sont composés de plâtre, de plomb, de carton ornés de peinture, de sable, de cendre, de photos, de végétaux. Ils sont posés majestueux sur des vitrines en verre à la bibliothèque nationale. Ces textes objets célèbrent la femme, le sexe, ou la Kabbale, la Shoah, certains sont ornés de fleurs qui font échos à celles de Matisse, un des peintres préférés de Kiefer. "Ce n'est pas seulement de la belle peinture, je vois chez lui une souffrance énorme, une désespérance, et ça m'intéresse", explique l'artiste à RTL.
Les premiers livres conceptuels de Kieffer datent de 1968. L'Allemagne d'alors se tait encore sur son passé nazi. En 69, l'artiste imagine une performance qu'il appelle Occupation. il porte l'uniforme militaire de son père et se fait prendre en photo excécutant le salut nazi dans les grandes villes d'Europe. Vous en verrez un échantillon à Beaubourg. Des œuvres fragiles parmi d'autres beaucoup plus imposantes. Parce que Anselm Kieffer fait des tableaux physiques, Il travaille avec de gestes amples dans son entrepôt de 35.000 m2 en Seine et Marne qu'il parcourt à bicyclette.

Je travaille tout le temps, je travaille avec mon corps. Mon moteur, c'est d'être surpris.

Anselm Kiefer

 "Je travaille tout le temps, je travaille avec mon corps. Mon moteur, c'est d'être surpris. Je travaille presque inconsciemment", confie-t-il. On admire surtout le travail de Kieffer pour sa façon d'utiliser les matériaux. En particulier le plomb. Mais ce qui le caractérise aussi, c'est qu'il ne jette rien. On appelle ça la syllogomanie, quand on veut en guérir, mais dans le cas de Kieffer, c'est une façon de vivre, un prétexte à créer. Et ceux qui ont eu la chance d'entrer dans son atelier ont été hallucinés par les accumulations. Ça va des arêtes du poisson mangé la veille, à la carcasse d'un avion. Pour Kieffer, l'esprit réside aussi dans les objets. "Je ne jette jamais rien, je mets tout dans des bibliothèques", explique-t-il. "Quand je vois une connexion spirituelle entre deux éléments, ça me fait plaisir de les sortir et de jouer avec."
Loin d'être démoralisant, l'univers de Kiefer est fascinant. On est saisis par la force qui se dégage de ses œuvres. La bibliothèque nationale nous fait découvrir l'homme intime, Beaubourg nous fait connaître l'artiste qui a donné à la peinture contemporaine une dimension tragique qui n'a rien de folklorique, ni même provocateur. C'est la tragédie de l'époque qui est son sujet. Inépuisable sujet pour un artiste infatigable.

À lire aussi

festival de Cannes

DOCUMENT M6/RTL - "Nous avons six idées de nouveaux films" : les confidences de Tom Cruise