Il est très inhabituel de voir les petits patrons gronder, éructer, tempêter. Ce sont les dirigeants de petites entreprises, les artisans et les commerçants, excédés par les impôts et, plus encore, par les nouvelles lois qui leur compliquent l'existence. Ils ont l'impression d'être les pigeons, les dindons, on pourrait allonger la liste des volatiles.
Voilà bien longtemps qu'il n'y a pas eu un tel climat d'exaspération, d'autant plus étonnant qu'en apparence, le gouvernement multiplie les déclarations d'amour. Alors, on va tâcher de comprendre les raisons de la colère.
La dernière fois que les patrons sont descendus dans la rue, c'était il y a quinze ans, pour protester contre la loi sur les 35 heures. Et auparavant, c'était dans les années 1970, avec les jacqueries organisées par Gérard Nicoud, le patron du Cidunati (Confédération intersyndicale de défense et Union nationale d'action des travailleurs indépendants). Il prenait d'assaut les perceptions ou les centres de sécurité sociale pour brûler les dossiers. Et aujourd'hui, on n'est pas très loin de ce climat de rébellion, tant l'exaspération est profonde.
Là où un dirigeant du Cac va gagner 3 ou 4 millions d'euros, eux sont plutôt à 60 000 euros par an, c'est à dire un salaire de cadre.
François Lenglet
Ce ne sont pas les patrons, mais les petits patrons qui sont en colère. Cette France des dirigeants obscurs, qui managent des entreprises de 10, 20, 100 ou 200 salariés, davantage CGPME que Medef. Ils n'ont rien de commun avec les grands patrons.
Là où un dirigeant du CAC va gagner 3 ou 4 millions d'euros, eux sont plutôt à 60 000 euros par an, c'est à dire un salaire de cadre. Là où les aristocrates de l'entreprise bénéficient de retraites chapeau, eux n'ont souvent pas de protection sociale complète.
Et, contrairement aux grandes entreprises, les petites et moyennes font toute leur activité en France. Elles subissent donc la croissance zéro et un taux d'imposition bien plus élevé que les grandes, qui ont souvent des possibilités légales pour atténuer leur charge fiscale. On parle toujours "des" entreprises, mais le CAC et les autres, ce sont deux mondes complètement différents.
Les petits patrons ont le sentiment d'être harcelés par le gouvernement. Et les relations sont à ce point détériorées que la confiance semble impossible à rétablir : bon nombre de dirigeants de PME attendent la fin du quinquennat en serrant les dents.
Il y a bien eu les mots de Manuel Valls à l'Assemblée du Medef, à la rentrée. Mais depuis, trois lois sont venues leur compliquer la vie. Le compte pénibilité d'abord : il va falloir qu'ils calculent chaque année un bonus de cotisation pour leurs employés qui ont un travail réputé pénible. La version initiale du texte était une usine à gaz incroyable. Il fallait par exemple compter, tous les jours, le temps passé avec une inclinaison du buste supérieure à 30 degrés... Aucun sens, surtout pour une PME qui n'a pas de DRH.
La deuxième est logée dans la loi Hamon : il s'agit de l'obligation, pour un chef d'entreprise qui veut céder sa société, de prévenir le personnel deux mois avant. Aucune chance de préserver la confidentialité qui est pourtant cruciale dans des négociations de vente.
Et le dernier point, c'est le plancher de 24 heures par semaine pour un temps partiel, ce que nombre de petites entreprises jugent impraticable.
Les baisses de charges, ce sera demain, alors que les impôts et les contraintes nouvelles, c'est tout de suite.
François Lenglet
Autant de textes imposés par une majorité parlementaire bien souvent ignorante des réalités du terrain, et dominée par le désir de bouffer du patron, c'est à dire d'obtenir des "contreparties" au pacte de responsabilité.
Certes ce pacte prévoit des dizaines de milliards de baisse de charges sociales mais il n'est pas encore mis en oeuvre. Son application va s'échelonner sur les années qui viennent. Les milliards ne sont donc pas tous au rendez-vous. Et ils ne compensent pas les fortes augmentations d'impôt que les entreprises - et les ménages d'ailleurs - ont subies depuis 2010, avant même l'élection de François Hollande. Les baisses de charges, ce sera demain, alors que les impôts et les contraintes nouvelles, c'est tout de suite.
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