Alibaba : la folle ascension de Jack Ma, le fondateur du site de e-commerce
PORTRAIT - Fondateur et président d'Alibaba, Jack Ma est passé en une dizaine d'années d'un travail de professeur d'anglais à une place parmi les cent premières fortunes mondiales.
Au terme d'une tournée séduction qui lui a fait faire le tour du monde, Jack Ma a réussi un coup incroyable : la plus grosse introduction en bourse de l'histoire. Ce succès ne sera sûrement pas le dernier pour l'homme qui est en train de faire passer le web chinois dans une autre dimension.
Car ce vendredi 19 septembre, Alibaba est devenue la première pépite du web chinois à déclencher l'hystérie à Wall Street. Déjà réévalué à plusieurs reprises au cours des dernières semaines, le titre finalement été introduit à 68 dollars avant de bondir jusqu'à frôler la barre symbolique des 100 dollars pour terminer la journée à +38%.
De Hangzhou à Wall Street
Cette introduction aux allures de triomphe a permis au groupe chinois de lever une somme record supérieure à 25 milliards de dollars et même d'arriver immédiatement parmi les dix plus grosses capitalisation de Wall Street, devant des monstres comme Wallmart, JP Morgan ou Pfizer.
Une journée historique, donc, qui a consacré Jack Ma, un homme à part dans le web mondial, dont la notoriété et les coups de génies ont accompagné l'irrésistible ascension du dernier géant numérique.
À la fin du siècle dernier près de Hangzhou, la mégalopole chinoise au passé glorieux, un professeur d'anglais a une idée géniale : Ma Yun va lancer un site de e-commerce ouvert sur l'international. Une rareté sans pareil dans l'Empire du milieu. L'objectif de ce fils d'acteurs qui deviendra rapidement Jack Ma le milliardaire : aider de petites entreprises chinoises à s'ouvrir sur ce qui se fait de mieux mondialement dans leur domaine.
Un patron chanteur
Visionnaire, il affirme à qui veut l'entendre, dès les premiers jours de sa société qu'il nomme Alibaba, que ses concurrents ne se trouvent pas en Chine mais aux États-Unis, là où se créent les tendances de la tech mondiale : la Silicon Valley.
Ma Yun est donc un entrepreneur novateur, qui ne perd jamais de vue la libre-concurrence, une anomalie dans un pays loin de prôner et parfois même de permettre l'ouverture. Cette culture de l'entreprise, il la pousse jusqu'à créer un environnement de travail digne des modèles mondiaux les Google et autres Facebook, bien loin de l'ascétisme traditionnel en Chine.
En bon patron excentrique, il est toujours prompt à se donner en spectacle, comme lors des Alifest, ces célébrations annuelles qu'il instaure et dans lesquelles se retrouvent les salariés de la société, suffisamment nombreux pour garnir les plus grands stades de football du pays.
Capable de vaincre le géant eBay
Et alors que l'emprise d'AliBaba sur le territoire national grandit, Jack Ma s'offre un affrontement à la David et Goliath contre eBay. En 2003, le géant mondial a racheté EachNet, un autre groupe chinois de e-commerce avec pour objectif de conquérir la Chine et son milliard de clients potentiels.
C'était sans compter sur la hargne de Jack Ma qui attaque Ebay sur tous les fronts : paiement en ligne avec Alipay, e-commerce grand public avec TaoBao et surtout lobbying auprès des petites entreprises chinoises, ses clients de toujours. En quelques mois, les messages vantant les entreprises de Jack Ma envahissent l'Internet chinois et même les médias traditionnels pour donner une victoire éclatante à Alibaba. Au point de faire lâcher eBay, qui quitte la Chine en 2006, vaincu.
Et Ma Yun continue de se construire et de créer un personnage qui fascine autant qu'il attire le feu des projecteurs. Pour se faire un nom auprès de ses futurs clients, il devient Jack Ma, le nom par lequel il se fait appeler quand il rencontre des Occidentaux.
Proche des petits entrepreneurs
Et l'insatiable ne s'arrête pas en si bon chemin. Jack Ma s'attaque au e-commerce mobile, crée la première banque privée du pays et conquiert toujours plus d'entreprises qui lui confient des missions toujours plus nombreuses (gestion de stock, finances etc.).
Sans être omniprésent, Jack Ma devient progressivement un homme qui compte, dans un milieu où l'estime de ses paires est indispensable. Aux portes du top 100 des fortunes mondiales (il a empoché plus de 650 millions d'euros avec l'entrée en bourse d'Alibaba), il est nommé homme de l'année en 2013 par le Financial Times.
Alibaba pèse 2,5% du PIB chinois
Cette consécration internationale est un accomplissement pour le Bill Gates chinois et ses millions de fans nationaux. Un succès de plus pour celui qui avait amené des milliers de jeunes chinois à l'anglais grâce à ses cours avant-gardistes.
Aujourd'hui, Alibaba représente plus de 52% du e-commerce chinois et 75% des transactions sur mobile. Mieux encore, il représente plus de transactions que les deux géants Amazon et eBay réunis.
Dernière victoire : il parvient à séduire la rigide élite politique locale et obtient l'investissement de nombreux fonds proches du régime dans sa société. Il faut dire que l'entreprise est depuis longtemps devenue une fierté chinoise et pour cause : elle représente aujourd'hui plus de 2,5% du PIB national. La dernière étape avant une ultime conquête : celle de Wall Street.
