Isabelle Morini-Bosc : "La télé est une vaste entreprise de recyclage"

Résumons, récapitulons, additionnons...Vis ma vie, L'Académie des neuf, La Roue de la fortune, Le Maillon faible, À prendre ou à laisser, Intervilles, etc. J'en pose deux et j'en retiens un... Je retiens surtout le fait que la télé est une vaste entreprise de recyclage. On parle souvent d'elle comme d'une machine à conditionner alors qu'elle sert plutôt à "reconditionner".

Est-ce que je le déplore au nom du manque de créativité, de vraies idées neuves ? Non, c'est logique : Il en va de la télé comme de la mode, tout n'est que perpétuel recommencement, ce qui souvent nous chiffonne. À tort. Ne soyons pas naïfs. Pas besoin d'être bon en calculs pour relever des évidences. À quand remontent les premiers programmes populaires ? Aux années 50. Les premiers scandales d'ailleurs également, avec par exemple des maires de France s'épilant vulgairement dans Intervilles et s'exposant à tout, surtout au ridicule (1964); ou encore le célébrissime animateur Jacques Angelvin écopant de 7 ans de prison pour s'être fait choper en 62 aux USA avec de la cocaïne dans les roues de sa Chevrolet.

L'illusion du neuf

Mais revenons à nos calculs. Sachant qu'à partir des années 90, il y a eu "du programme 24h/24", d'abord sur 6 chaînes, puis sur des dizaines, aujourd'hui sur des centaines, je vous laisser évaluer le nombre d'heures à produire chaque jour pour alimenter la "bête", même en tenant compte des rediffusions à profusion (on se réjouit globalement d'un second marché augmentant l'espérance de vie des programmes).

À quelle conclusion en arrive-t-on ? Au fait que tout avait déjà été crée dès les années 60, et que seuls les effets spéciaux "font la différence" en donnant l'illusion du neuf. c'est un peu comme une palette de peintre riche de dizaines de couleurs toutes issues des 7 de base. Il y a du 36 chandelles dans tout divertissement populaire, de La boite à sel dans chaque bande d'iconoclastes-chroniqueurs, de La course autour du monde dans chaque jeu d'aventures, etc. Cela devrait tous nous inciter à plus d'humilité. En même temps suis-je sotte, si ce métier était humble, ça se saurait. Je vous laisse méditer avant ramassage des copies.