Dans son atelier installé au sous-sol d’une pépinière d’entreprises, à Compiègne, Jérôme Wiss souffle dans un drôle d’instrument à vent, qui produit un son très grave. "Lors de mes études, je me suis tout de suite spécialisé dans la facture des instruments à vent, des cuivres, et j’ai pris un malin plaisir à reconstituer un instrument qui a été complètement oublié, qui s’appelle l’ophicléide", raconte-t-il. Il fallait être un touche-à-tout talentueux, à la fois musicien - il jouait de l'euphonium au conservatoire - et bricoleur - Jérôme adorait démonter ses mobylettes - pour se consacrer à cet antique cuivre.
"'Ophi', ça veut dire serpent et 'cléide', clé en grec. C’est un instrument qui date de 1814. C’était l’ancêtre du tuba et du saxo euphonium qu’on joue actuellement à l’orchestre", explique Jérôme. La plupart des ophicélides encore en circulation ont été fabriqués au XIXe siècle et sont dans un piteux état. Jérôme a commencé par restaurer ces instruments qu’il achetait dans des greniers ou sur des brocantes. "C'était aussi le pari de dire, là, l’instrument il lui manque 90% des clés, il est complètement troué… vu ce qu’il y a à faire, je suis sûr que je vais perdre moins de temps à en fabriquer un neuf. C’était plus un défi qu’autre chose", souligne l’artisan. Après son diplôme à l'Institut des métiers de la musique du Mans, cet Alsacien effectue des stages en Allemagne, travaille chez un grand fabricant de cuivres français aujourd’hui disparu. Puis, il s'installe à son compte dans l’Oise dans un local qu'il aménage de fond en combles.
"Je ne suis ni charpentier, ni maçon, ni électricien. Du coup, j'ai dû tout apprendre. On a de la chance avec YouTube, ça aide quand même pas mal !", dit ce débrouillard né. Presse, rôdeuse, tour, Jérôme investit dans une série de vieilles machines-outils d'occasion, encore très précises. Car, à la différence de la plupart des facteurs d'instruments, Jérôme est un véritable créateur.
"100% de tous les instruments que je fabrique et que je vais fabriquer plus tard, sont conçus sur ordinateur. Ce n'est pas comme toutes les marques qui se copient. Il n'y a rien qui ressemble plus à une trompette qu'une trompette d'une autre marque", dit-il. Jérôme, lui, "n’aime pas ce travail de copie" qui ne l’"intéresse pas". "Je pars d’une feuille blanche et je re-fabrique tout sur ordinateur à partir d’une étude acoustique et après en conception 3D", dit-il.
Grâce à un logiciel d'acoustique, Jérôme peut prévoir à quelle fréquence l'instrument va jouer et concevoir ses premiers prototypes qu'il imprime en 3D. Il nous montre une trompette qu’il a fabriquée de cette façon. "Dans la famille des cuivres, c'est l'instrument le plus joué. C'est aussi pour ça que j'ai commencé par cet instrument-là. Je suis assez fier, parce qu’il y a très peu de fabricants au monde qui fabriquent une trompette de A à Z. Ils font appel à beaucoup de sous-traitants. Moi, j’essaie au maximum d’éviter la sous-traitance pour garder le savoir-faire français", dit-il.
Quant aux ophicléides, Jérôme Wiss compte en fabriquer d'abord une quinzaine par an, qu'il vendra surtout à des orchestres au répertoire romantique, à raison de 10.000 euros pièce environ. Et ce garçon généreux est prêt à partager son savoir-faire. "Tout le monde peut le faire, j’en suis persuadé. Il faut avoir un peu de temps. Enfin, beaucoup de temps… et ne pas avoir de vie tout court", conclut-il.
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