Isabelle Morini-Bosc : "Inadmissible que les jeunes en sachent si peu sur la Shoah"

Comment, en 2015, peut-on encore répéter que l'on ne savait "rien ou pas grand chose" sur la Shoah, ce génocide organisé par les nazis dans le but d'exterminer "tous les juifs jusqu'au dernier" ? À chaque diffusion télé d'un film sur les horreurs qu'ils ont orchestrées, des adolescents en état de choc (mais aussi en âge de savoir) murmurent : "On ne savait pas". Si, je vous assure ! Comment, dès lors, ne pas être perplexe ?

Public, privé, TNT, toutes les chaines montrent à tous horaires et depuis des années des documents insoutenables et incontournables sur cette décennie 1938-1948 où on a tout osé, à condition que ce soit le pire. Avec des archives d'actes innommables qu'il fallait pourtant nommer, de sévices immontrables qu'il fallait pourtant montrer. Pour le devoir de mémoire. Le "plus jamais ça".

Massacres perpétrés en Ukraine ou Lituanie par des civils

Claude Lanzmann, Patrick Rotman, René-Jean Bouyer, ils ont tous raconté. Avec des documents toujours plus nombreux. Et chaque fois il s'en trouve pour redire : "J'ignorais que c'était à ce point-là". Or s'il est peut-être normal que les ados ne connaissent que des bribes de drames, il n'est pas admissible que leurs jeunes aînés soient si nombreux à en savoir si peu sur ces ignominies qui ont défiguré le monde.

Alors, même si la succession d'historiens à l'antenne est parfois moins efficace qu'une "voix off" accompagnant des images parlant hélas d'elles mêmes, il faut regarder ce soir les 4 volets de la série-documentairede France 2, Jusqu'au dernier: La destruction des juifs d'Europe. On y découvre notamment les massacres perpétrés en Ukraine ou Lituanie par des civils hilares sur les "juifs dit bolcheviques". Là, oui, même les plus avertis d'entre nous n'admettent pas ce que leurs yeux voient. Et la seule chose que nous puissions enfin faire pour ceux, morts ou survivants, qui n'ont pas pu raconter, c'est de regarder. 20h45, France 2.