Nicolas Sarkozy : ses soutiens développent un "story-telling du sauveur", explique une sémiologue

DÉCRYPTAGE - La sémiologue Elodie Mielczarek a analysé les déclarations et les éléments de langage des soutiens de l'ancien président.

Nadine Morano lors d'une réunion des Amis de Nicolas Sarkozy le 20 février 2013.

Crédit : PATRICK KOVARIK / AFP

Je m'abonne à la newsletter « Politique »

Invité de RTL, mercredi 29 janvier, Brice Hortefeux a qualifié Nicolas Sarkozy de "référence" et "peut-être une espérance" pour la droite. À l'instar de l'ancien ministre de l'Intérieur, ils sont plusieurs à régulièrement parler de l'ex-président en termes élogieux.

Elodie Mielczarek, sémiologue spécialiste en communication publicitaire et politique, a décrypté pour RTL les éléments de langage et le sens des formules utilisées par Brice Hortefeux, Christian Estrosi, Bernadette Chirac, Henri Guani et Jean-Pierre Raffarin lorsqu'ils évoquent Nicolas Sarkozy.

À regarder

Brice Hortefeux : "Sarkozy apparaît peut-être comme une espérance"

00:08:13

Un leader pas si "naturel" que ça

"Nadine Morano et Christian Estrosi répètent plusieurs fois que Nicolas Sarkozy est 'le leader naturel de la droite'. Cette idée, répétée aussi souvent, démontre la rupture qui existe au sein de l'UMP sur le cas de l'ancien président. En répétant qu'il est le leader 'naturel', ses soutiens prouvent en réalité qu'il ne l'est pas pour de nombreux membres du parti - notamment les copéistes et les fillonistes. Ils tentent de légitimer quelque chose qui n'est pas aussi évident que ce qu'ils affirment. À ce titre, ils me rappellent Jacques Chirac, qui ponctuait souvent ses phrases d'un 'naturellement' qui n'avait pas vraiment sa place dans les propos qu'il tenait".

Selon Elodie Mielczarek, des responsables politiques comme Christian Estrosi et Nadine Morano "construisent un discours autour de Nicolas Sarkozy. Ils ont fabriqué une ligne d'attaque et un argumentaire communs. Leurs déclarations sont remplies d'éléments de langage préparés à l'avance".

De fausses conditions pour son retour

"Jean-Pierre Raffarin et Christian Estrosi mettent en avant des conditions au retour de Nicolas Sarkozy - 's'il se dégageait de manière indiscutable et durable' - mais elles ne sont là que pour la forme. Leur incantation concernant son autorité naturelle et l'évidence de son retour laissent penser que le contrat est déjà rempli. Cette mise à distance est fausse et ne relève que de la prudence élémentaire. Il faudrait être inconséquent pour agir autrement mais leurs déclarations montrent que le retour de Nicolas Sarkozy est évident et que les jeux sont faits".

Une amitié sincère

Un trait commun caractérise, selon Elodie Mielczarek, les soutiens les plus fervents de l'ancien président de la République : la sincérité. Brice Hortefeux et Bernadette Chirac laissent, par exemple, transparaître "un vif espoir" de voir Nicolas Sarkozy revenir : "On le voit particulièrement chez Brice Hortefeux, dans sa différence d'attitude, selon qu'il parle de François Hollande ou Nicolas Sarkozy. Lorsqu'il évoque le Président, il affiche clairement du mépris - il parle de manière distanciée - alors qu'il sourit et parle à la première personne lorsque le nom de Nicolas Sarkozy vient dans la conversation. On sent qu'il existe un vrai plaisir à parler de lui". Une attitude on ne peut plus normale lorsque l'on sait que les deux hommes sont amis de longue date.

À l'instar de Brice Hortefeux, Bernadette Chirac affiche toute son affection pour l'ex-président : "Elle le défend avec agressivité et fait montre d'une certaine forme d'impatience lorsqu'il s'agit de parler de son retour - elle répète plusieurs fois 'je l'espère'. Sa spontanéité montre son attachement".

Un respect confinant à la quasi-dévotion

Au contraire des deux cas précédemment évoqués, Henri Guaino, Christian Estrosi et Nadine Morano n'affichent pas d'amitié pour Nicolas Sarkozy mais un grand attachement à l'homme politique : "Henri Guaino fait un discours factuel, faisant appel à de grands concepts - 'Sans lui, il n'y aurait plus de démocratie en France, en Europe et dans le monde' - mais sa conviction est trahie par la position quasi-religieuse de ses mains, jointes. On est dans le domaine de l'incantation, du respect et même de la dévotion".

Même constat pour le maire de Nice et la candidate UMP aux Européennes. Leur défense de Nicolas Sarkozy s'axe uniquement sur la politique mais le développement d'un "story-telling du sauveur" marque leur fidélité à l'ancien chef de l’État.

La rédaction vous recommande