Selon le service des statistiques du ministère du Travail (Dares) publiées mardi 22 décembre, les conflits sociaux ont atteint leur plus bas niveau il y a deux ans. La France n'est plus le pays des manifestations et des grèves. Cela va faire un choc à Maurice Taylor, le patron américain de Titan qui pensait que les Français passaient leur vie au pied des piquets de grève. En 2013, 1,2% des entreprises de plus de dix salariés du privé ont connu au moins une grève ou un débrayage. On n'avait pas vu un niveau aussi bas depuis 2008. 2008, c'est l'année où Nicolas Sarkozy s'était amusé à dire qu'aujourd'hui quand il y avait une grève en France, personne ne s'en rendait compte. La réalité, c'est que ce n'est pas une volonté politique ou la mise en place du service minimum qui explique ce niveau très bas, mais la peur du chômage tout simplement. Dans le public, en revanche, il y a encore une vraie représentation syndicale et sans doute une crainte moins forte de perdre son travail.
La plupart des grèves qu'on a en tête sont pour sauver des emplois. Ce sont les mouvements qui marquent les esprits. 2013, c'est l'année de l'occupation de Florange avec Édouard Martin qui défie François Hollande dans les médias en lui promettant d'être son "malheur". Mais en réalité, on s'aperçoit que la moitié des jours de grève (47%) sont liés à des mouvements nationaux pour dénoncer la politique du gouvernement. En 2013, c'était contre l'accord sur la sécurisation de l'emploi. Cela pourrait être contre la réforme des retraites ou la loi Macron.
Mais la vérité, c'est qu'en période de chômage de masse comme on le connait en ce moment, les salariés ont peur et ne partent plus dans des grands mouvements collectifs. On l'a encore vu récemment à l'usine Smart d'Ambach. Quand la direction prend individuellement chaque salarié et lui dit : "Soit tu acceptes de travailler 39 heures payées 37, soit on ferme l'usine". Le résultat, ce n'est plus une grève mais la signature de l'avenant au contrat.
L'autre vérité, c'est que la grève ne fait plus recette. Le nombre de journées baisse progressivement depuis 1975 à mesure que le poids des syndicats diminue dans les entreprises, et aussi parce que les grèves ont un coût direct pour les salariés à la fin du mois avec des jours de paie en moins.
Les grandes révoltes ouvrières, c'est donc du passé ? Pas totalement. La grève se radicalise maintenant. C'est la dernière digue qui saute. C'est alors un mouvement désespéré qui peut durer plus longtemps et devenir extrêmement violent. Ce n'est plus un mouvement encadré, organisé par les syndicats, c'est un mouvement de rue, un immense coup de gueule quand les ouvriers n'ont plus aucun espoir. On a tous en tête les DRH d'Air France et leurs chemises déchirées, ce sera une des images de 2015. En l’occurrence, ce n'était pas dans le cadre d'une grève, mais ça illustre la violence sociale dans laquelle certains tombent quand il n'y a plus l'espoir de sauver les emplois.
Mais en 2013, on avait les employés de la fonderie DMI à Vaux, dans l'Allier, qui menaçaient de faire sauter leur usine. Même chose ensuite chez Metaleurop ou New Fabris. Des séquestrations, des bonbonnes de gaz, du poison dans les cours d'eau... Tout cela existe et n'est pas maîtrisé par les grandes centrales syndicales qui sont dépassées par leurs bases. C'est vrai chez les salariés, mais c'est vrai aussi avec les Medef territoriaux en région qui sont beaucoup plus radicaux que Pierre Gattaz. La grève est moins visible, mais la grogne sociale est là. On pourrait dire comme autrefois à Louis XVI : "La grève n'est pas une révolte, sire, c'est la révolution".
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