Trois économistes ont étudié les élections dans vingt pays depuis 1870 (cela représente 800 scrutins). Ils ont constaté que systématiquement, l'extrême-droite progressait après une crise financière, généralement avec un parti neuf, alors que la scène politique traditionnelle se délitait. Selon cette étude, le maximum de l'intensité de cette montée de l'extrême-droite est observé cinq ans après la crise. Si on considère que la crise européenne a débuté en 2010, avec la crise de l'euro, nous serions justement en 2015, à cet apogée.
C'est cela qui explique l'extraordinaire montée de l'extrême-droite chez nous, à cause de la récession et de la progression du chômage que la crise a provoquées, et contre lesquelles les gouvernements en place ne parviennent pas à lutter efficacement. Cela vaut pour la France, mais aussi pour la Belgique, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède ou encore les pays de l'Europe de l'Est. Les seuls qui échappent à cela sont les pays d'Europe du Sud, comme l'Espagne, le Portugal et jusqu'ici la Grèce. Ils ont encore la mémoire des dictatures militaires tombées dans les années 1970. Ils sont en quelque sorte vaccinés. Il y a aussi l'Allemagne, bien sûr, pour des raisons similaires.
Sur l'échelle du stress social, nous sommes à un niveau sans précédent depuis la guerre
François Lenglet
Pourquoi les crises financières et pas les récessions classiques ? Parce qu'une récession classique est perçue comme un événement extérieur, presque comme la météo, sur lequel on n'a pas de prise. Une crise financière, elle, est vue comme un événement endogène, une faille dans le système, qui le rend critiquable. Elle déclenche des opérations de sauvetage financier, sur fonds publics, pour les banques ou les grandes entreprises. Cela alimente le ressentiment des victimes de la crise, qui pensent que les coupables ne sont pas punis, qu'ils sont même protégés. En principe, toujours selon l'étude, ce sentiment s'affaiblit peu à peu. Dix ans après la crise, il a disparu, et l'on revient à des schémas politiques classiques.
Pour ce qui est du Front national, la crise des migrants en Europe a dû jouer aussi son rôle. D'autres économistes ont observé cela très précisément, toujours en Europe : il y a une forte corrélation - "alarmante", nous dit cette étude parue il y a huit jours - entre l'immigration et la proportion de votes pour l'extrême-droite, qui évoluent de façon parallèle. Le premier thème politique de l'extrême-droite, c'est la lutte contre l'immigration. Cela expliquerait pourquoi des pays qui n'ont que peu connu la crise financière, comme la Suède et la Norvège, ont aussi des partis extrémistes puissants.
Pour ce qui est de la France, il y a en fait trois facteurs qui se conjuguent : les effets persistants de la crise économique, la crainte du flux migratoire et la peur des attentats djihadistes. Sur l'échelle du stress social, nous sommes aujourd'hui à un niveau sans précédent depuis la guerre.
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