Elle court un marathon sans tampon pour briser le tabou sur les règles
Kiran Gandhi a voulu sensibiliser l'opinion publique sur les problèmes rencontrés par les femmes du Tiers Monde, qui n'ont pas accès aux protections périodiques.

Kiran Gandhi a tout d'une battante. Cette fille d'immigrés indiens vit à Londres, a un diplôme de commerce de l'Université de Harvard (excusez du peu), travaille dans l'industrie de la musique et a été la batteuse de M.I.A. (excusez du peu, encore une fois). Le 26 avril a lieu le marathon de Londres, pour lequel Kiran s'entraîne depuis un an. C'est une première pour elle et la veille au soir, elle se prépare mentalement aux plus de 40 kilomètres de course qui l'attendent. Des grosses crampes la saisissent, annonçant l'arrivée imminente de ses règles. Kiran prend alors une décision qui va faire grand bruit : courir le marathon sans protection périodique.
Mettre un terme au tabou que représentent les règles
Sur place, des photographes ne manquent pas d'immortaliser la jeune femme en pleine course, son entre-jambe marquée d'une large tache sombre. Il n'en fallait pas plus pour provoquer admiration et répulsion.
Au milieu des réactions, Kiran publie une tribune où elle explique sa démarche. "Alors que je courrais, je réfléchissais au fait que les hommes et les femmes ont été conditionnés pour faire semblant que les règles n'existent pas", écrit Kiran. "En rendant les règles honteuses, la société nous empêche de nous réunir autour d'une expérience que 50% de la population partage chaque mois."
En rendant les règles honteuses, la société nous empêche de nous réunir autour d'une expérience que 50% de la population partage chaque mois
Kiran Gandhi
Malgré cette conviction, Kiran ne peut s'empêcher de tirer sur son t-shirt pour dissimuler sa tache grandissante quand elle aperçoit son père et son frère sur le côté, venus l'encourager. Elle se ravise en voyant leurs mines réjouies : "Les deux hommes les plus importants de ma vie étaient dans l'équipe féministe."
Améliorer l'hygiène menstruelle des femmes du Tiers Monde
En décidant de courir sans protection hygiénique, Kiran a aussi voulu sensibliser l'opinion publique à l'enjeu que représente une meilleure hygiène menstruelle dans le Tiers Monde, où ce sujet est encore moins abordé qu'en Occident.
"Imaginez à quel point les femmes vivant dans des pays en développement subissent les secrets et tabous autour des règles", rappelle Kiran. "Notre culture leur dit de cacher leurs écoulements mensuels, malgré le fait que les moyens permettant de se nettoyer ne sont ni écologiques, ni abordables financièrement. Même les femmes qui peuvent utiliser des bouts de tissu pour absorber le sang n'ont pas toujours des endroits privatisés à l'école ou au travail pour les changer. Résultat : elles préfèrent sécher les cours ou trouver une alternative moins honteuse pour elles."
Kiran Gandhi rappelle que les petites filles indiennes sont 23% à abandonner l'école une fois qu'elles entrent dans la puberté. "Jusqu'à 70% des maladies des organes reproducteurs sont dûs à une mauvaise hygiène menstruelle", déplore Kiran. Dans les parties les plus reculées du pays, les femmes peuvent en arriver à utiliser "vieux chiffons, enveloppes, feuilles séchées, herbe, cendres ou papiers journaux" pendant leurs menstruations.
De nombreuses initiatives sont menées pour éduquer les pays en développement en matière d'hygiène menstruelle. En Inde, un entrepreneur a créé une machine permettant de produire en masse des serviettes hygiéniques. Certaines ONG ou associations s'occupent aussi de distribuer serviettes, tampons ou coupes menstruelles dans différents pays du Tiers Monde.
- Le flux instinctif, l'art de vivre ses règles sans protections hygiéniques
- La coupe menstruelle : pourquoi l'adopter ?
- Elizabeth Olsen, révélation du cinéma indépendant et nouvelle coqueluche d'Hollywood
- 9 choses que vous ignorez sur le sexe féminin
- Le 8 mars est la journée internationale pour les droits des femmes