C'était la première étape de la mobilisation contre la loi El Khomri. Plusieurs centaines de milliers de jeunes ont manifesté un peu partout en France mercredi 9 mars. Ce n'est ni un succès ni un échec, si on se place du côté de la manifestation. Si on se place du côté du gouvernement, il y a un signe qui ne trompe pas : le Premier ministre était plutôt soulagé. Un député qui l'a rencontré à l'Assemblée nationale a décrit un Manuel Valls "assez rassuré", et même "assez décontracté". Peut-être le locataire de Matignon se rassure-t-il à bon compte d'ailleurs.
Cela enlève provisoirement une épine du pied du gouvernement, qui a pu évaluer ce premier rapport de force. Ce que craignaient le plus François Hollande et Manuel Valls, c'est que les jeunes entrent dès mercredi massivement dans cette mobilisation. Une partie de la gauche espérait d'ailleurs que ces manifestations se dérouleraient à grand renfort de jeunesse. Il n'y a pas eu de raz-de-marée. Peut-être qu'une partie des jeunes n'a pas bien compris l'objet de ces manifestations. Certains venaient à peine de rentrer de vacances, et en plus il pleuvait.
Mais attention parce que ce n'était qu'un premier coup. De nouvelles manifestions sont déjà annoncées pour le 17 mars. On ne sait pas comment cela peut tourner, à quel moment cela peut démarrer. Avec les jeunes, il faut être extrêmement prudent. On a vu qu'ils avaient l'intention d'installer leur mouvement. Le gouvernement aurait tort de penser que ce moment d'humeur a atteint son maximum. D'autant que cette mobilisation ne se résume pas aux jeunes seulement.
Ce n'est pas parce que le gouvernement s'est retiré provisoirement une épine du pied que l'épine n'est plus là. Il dispose d'un petit laps de temps pour traiter notamment les syndicats (c'est la question cruciale), avec la CFDT qu'il va falloir manipuler avec précaution et qu'il va falloir faire revenir dans le jeu. Pour le moment, la centrale syndicale de Laurent Berger se sent en position de force. Elle n'a pas du tout envie d’apparaître comme un supplétif du gouvernement….
Il va falloir aussi traiter la gauche, le Parti socialiste. Parce qu'il ne suffit pas de dire que le ministre allemand du Travail, issu de la gauche du SPD (l'équivalent de l'aile gauche du PS), trouve la loi El Khomri "formidable". Il ne suffit pas de relayer les propos de l'Italien Matteo Renzi qui a volé au secours de François Hollande.
Il va enfin falloir travailler l'opinion. Le Premier Ministre va réunir ce jeudi tous ses ministres. Vous pouvez être sûr que dans les heures et dans les jours qui suivront toute la cavalerie sera dans les médias. Tout l'enjeu pour Manuel Valls (et bien sûr pour François Hollande) va être de négocier sans trop concéder tout en limitant la défiance qui gagne du terrain. Ce n'est pas gagné.
Pendant les négociations à Matignon, les syndicats ont été surpris d'entendre plusieurs fois gratter à la porte de la salle de réunion. Jusqu'à ce qu'ils s'aperçoivent que ces bruits étranges provenaient d'un petit animal : le chiot du Premier ministre. Il s'agit d'un petit berger des Pyrénées. Son nom : "Largo". Pas comme Largo Winch. Non "Largo", du nom italien de ce mouvement de musique très lent. C'est sans doute l'épouse de Manuel Valls, la violoniste Anne Gravoin, qui a dû trouver ce petit nom. Parce que si le Premier ministre avait choisi, ça aurait été plutôt "Allegro", voire "Allegro fortissimo".
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