Quelques heures après le remaniement ministériel, François Hollande s'est expliqué. À l'Élysée, jeudi 11 février, le chef de l'État a accordé une interview télévisée à TF1 et France 2. Interrogé sur l'élargissement à gauche de son équipe gouvernementale, où plusieurs écologistes ont fait leur entrée, il a notamment assuré qu'il avait fait en sorte de conserver une certaine "cohérence".
Par ailleurs, le président de la République a balayé l'actualité en évoquant notamment le chômage, la réforme du code du travail et l'épineux dossier de Notre-Dame-des-Landes. Il est également revenu sur la lutte contre le terrorisme, en particulier sur la réforme constitutionnelle qui passionne les débats parlementaires depuis plusieurs semaines. Enfin, François Hollande s'est exprimé sur son ambition personnelle en vue de l'élection présidentielle de 2017.
Pour mettre un terme au "blocage" qui dure depuis plusieurs années sur ce projet controversé de construction de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, un référendum local va être organisé par le gouvernement et des élus locaux "pour que l'on sache exactement ce que veut la population". Le processus doit aboutir "d'ici octobre 2016", date prévue pour le début des travaux qui avaient été interrompus en 2012. "À un moment, il faut prendre une décision (...) Si c'est oui et que la population veut cet aéroport, alors tout le monde devra accepter cette décision. Si c'est non, vous savez que c'est un projet porté par l'État, qui en tirera les conséquences", prévient François Hollande.
Avant cette annonce, RTL révélait que la nouvelle ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, avait passé un accord pour la tenue de cette consultation locale. Mais le président a nié avoir mené de telles tractations : "Il n'y a pas de marchandage. Je ne négocie, je ne troque pas telle ou telle entrée au gouvernement contre tel ou tel renoncement. Il n'y a aucune négociation".
Concernant la crise agricole, qui touche en particulier les filières du lait et du porc, "le Premier ministre va annoncer, avant le 17 février, une nouvelle baisse des cotisations sociales, tout de suite, pour l'ensemble des agriculteurs", a déclaré François Hollande. Pour résoudre ce problème, le chef de l'État a promis que les choses allaient "bouger" à l'échelle européenne. Il s'est par ailleurs prononcé en faveur d'un "plan européen de stockage" et considère qu'il faut agir sur "l'embargo russe" sur les produits alimentaires annoncé en 2014 par Vladimir Poutine en réaction aux sanctions économiques prononcées contre la Russie.
Invité à commenter le retour des écologistes au sein du nouveau gouvernement annoncé quelques heures avant le début de l'interview, François Hollande reconnaît avoir mis en place une équipe ministérielle "élargi". Il était toutefois, selon lui, important de conserver une certaine "cohérence". C'est d'ailleurs pour cette même raison de ligne directrice que le président explique qu'il n'a "pas songé à changer de Premier ministre".
Concernant le retour de Jean-Marc Ayrault en tant que ministre des Affaires étrangères : "Il a l'expérience et il connaît les dossiers. Je ne voulais pas qu'il y ait le moindre temps perdu pour former un nouveau ministre des Affaires étrangères".
Ainsi, ce gouvernement a trois mots d'ordre : "agir, réformer, avancer". Il a également trois grandes priorités : "protéger les Français", "l'emploi" et enfin la mise en oeuvre de l'accord signé lors de "la COP21", la grande conférence sur le climat.
Invité à commenter les déclarations critiques d'Emmanuel Macron, notamment la dernière en date concernant son scepticisme sur la déchéance de nationalité, François Hollande a relativisé : "Qu'est-ce qu'il a dit Emmanuel Macron ? Il a dit qu'il ne suffit pas de déchoir de sa nationalité un terroriste pour régler le problème (...) S'il suffisait d'une mesure, d'un claquement de doigts, une déchéance de nationalité pour en terminer... Non, il faut agir".
Reste que ce n'est pas la première fois que le ministre de l'Économie s'écarte quelque peu de la ligne gouvernementale. Mais pas de quoi pour autant perdre la confiance du président : "Il a son tempérament et il n'est pas un personnage classique dans la vie politique. Mais je lui ai plusieurs fois rappelé qu'il y a une règle qui consiste à assurer la solidarité de l'équipe gouvernementale". Et d'ajouter : "Il y a des talents dans ce gouvernement. Moi, je pense qu'il vaut mieux des talents que des personnes qui viennent toujours commenter après".
À propos de la révision constitutionnelle, visant à inscrire dans l'état d'urgence et l'extension de la déchéance de nationalité dans la loi fondamentale, François Hollande s'est montré ferme en assurant qu'il ira au bout de sa démarche "si les parlementaires suivent". Cependant, il a invité les députés et les sénateurs à faire en sorte que l'examen du texte "ne dure trop longtemps" car "les Français veulent que ça se termine".
Enfin, François Hollande a été interrogé sur une éventuelle participation à une primaire à gauche en vue de l'élection présidentielle. Mais il l'assure : "Il y a ce que font les partis, et c'est leur rôle et il y a ce que j'ai à faire. Je ne vais pas rentrer dans ce débat de primaire. Je prendrai ma décision le jour venu. Tant qu'il n'est pas arrivé, j'ai à agir et réformer et je le ferai jusqu'au bout".