Une étude accablante sur la diplomatie allemande nazie
Selon une étude menée par quatre historiens publiée jeudi en Allemagne, le ministère allemand des Affaires étrangères a joué un rôle plus actif qu'on ne l'avait pensé jusqu'à présent dans la persécution et l'extermination des Juifs durant la Seconde Guerre Mondiale. Après la chute du régime de Hitler en 1945, tout avait été fait pour masquer le rôle joué par le ministère dans l'appareil nazi. En 2005, le ministre des Affaires étrangères de l'époque, Joschka Fischer avait diligenté une commission indépendante d'historiens pour éclaircir cette page sombre de l'histoire allemande. Dimanche, une association de survivants de l'Holocauste s'est félicité du travail de mémoire réalisé.
Un des historiens responsables pour l'étude, Eckart Conze, a affirmé à
l'édition dominicale du Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAS) que le
"ministère des Affaires étrangères a participé activement dès le début
à toutes les mesures de persécution, privation de droits, expulsion et
d'anéantissement des juifs".
Dans les archives, les historiens -- deux Allemands, un Israélien et
un Américain -- sont notamment tombés sur des justificatifs de voyage
du responsable du service des juifs, Franz Rademacher, qui inscrit
comme motif d'un déplacement à Belgrade: "Liquidation des juifs à
Belgrade et discussion avec des émissaires hongrois à Budapest".
Par ailleurs, et malgré les efforts de dénazification, nombre
d'anciens hauts diplomates de l'époque nazie ont tranquillement repris
leurs fonctions au ministère à partir de 1951, lorsqu'une loi a permis
la réintégration dans la fonction publique de 150.000 anciens
fonctionnaires épurés.
Dans les années 1960, souligne par ailleurs le rapport, un des
principaux responsables de la politique étrangère du pays avait été
Ernst Achenbach, un ancien diplomate qui s'était occupé des
déportations lorsqu'il avait été en poste pendant la guerre à Paris. M.
Achenbach, qui avait par la suite occupé un poste clé à la commission
des Affaires étrangères du parlement, s'était opposé jusqu'en 1974 à
la ratification d'un accord avec la France visant à faciliter la mise
en oeuvre de peines prononcées à l'encontre de criminels de guerre
nazis.
"L'Allemagne a entrepris de se pencher honnêtement et douloureusement sur son passé", a affirmé dans un communiqué Elan Steinberg, vice-président de l'Association américaine des survivants de l'Holocauste et de leurs descendants à New York. "Les entreprises du passé qui ont visé à exonérer le ministère des Affaires étrangères et son personnel des crimes de l'Holocauste sont désormais catégoriquement réfutées", a-t-il ajouté.